Interview n°2 avec le molphar


Avant mon départ pour le village houtsoul Verkniy Iasseniv où j'avais le rende-vous avec le fameux molphar Néchaiy dont la renommée a fait le tour d'Ukraine, il y a quelques années d'ici, je me suis imaginé un vieux sorcier au regard maléfique. Et avant d'entrer dans son humble demeure je me suis attardé devant sa porte, le temps de fumer une cigarette, pour chasser mes angoisses superstitieuses qui me tourmentaient surgissant de mon inconscient. Mais tout d'un coup pour ma grande surprise un homme est apparu sur le seuil de la maison, et avec un sourire chaleureux il s'est avancé vers nous. Il était exactement le contraire de l'image énigmatique que je me suis dessiné se laissant entraîner par mon imagination débordante. C'était un homme aux cheveux entièrement blancs mais au visage très peu ridé, mince, au regard vif et jeune, habillé dans un costume classique de deux pièces et faisait penser à un professeur d'école en retraite ou à un sacristain local. Et quand je suis entré dans sa demeure la déception s'est emparée de moi. Je suis incapable de dire précisément qu'est-ce que j'attendais d'y voir mais au premier regard, ce n'était qu'une maison ordinaire de compagne avec des icônes des saints accrochées en deux rangs sur un mur de la cuisine. Mais un peu plus tard notre molphar a mis ses vêtements de fête et nous a invité dans son cabinet de travail, où auparavant il accueillait les gens tous les jours. Et c'était une belle preuve pour moi, que la première impression peut être trompeuse.

- Pan (Monsieur) Mékhailo, je lui ai demandé pour commencer mon interviewe, il n'y a pas si long temps, toute l'Ukraine a parlé de vous, partout, on pouvait entendre votre nom et aujourd'hui on dirait qu'on vous a oublié, comment est-ce possible ?

- Aujourd'hui je ne travaille plus avec les centres médicaux comme je le faisais avant, je ne cueille les herbes que pour mon propre usage, je n'en vends plus. Quand quelqu'un veut s'adresser à moi je peux essayer de l'aider. Mais maintenant cela arrive de plus en plus rare. Je ne pratique plus mon art de guérir chez moi comme je le faisais auparavant. Parce qu'on voulait m'imposer un prix trop élevé, 70 grivnas par patient. J'étais obligé de coopérer avec ces centres médicaux qui ont fixé leur tarif. Mais nos compatriotes sont appauvris dans ces temps difficiles pour notre pays, ils ne peuvent pas se permettre de sortir une telle somme pour une cure de santé. Voilà pourquoi j'attends...peut-être, il y aura des changements. Quand j'essayais de me débrouiller tout seul, chez moi, avec mes maigres moyens, les gens qui ont fait un long voyage pour venir me voir et pour lesquels, je représentais leur ultime espoir, étaient souvent obligés de dormir à la belle étoile et attendre leur tour pour franchir le seuil de mon cabinet de travail, sous la pluie ou sous le soleil brûlant. Ce n'était pas une solution non plus.

- Le grand père Néchaiy nous également raconté, que toute cette foule de visiteurs qu'il
avait l'habitude de recevoir devenait embarrassante non seulement pour les visiteurs eux-mêmes, mais pour la famille du guérisseur aussi. L'ironie du sort a fait du sorte que cet entassement du monde fou devant sa porte a empêché une fois, la rencontre de Pan Mékhailo avec son frère, et ce n'est que le lendemain au petit matin qui l'a trouvé le petit mot de son frère abandonné par terre près de sa maison. Et même si le molphar lui même ne se plaignait pas de la fatigue où de manque de forces, sa femme ne pouvait plus supporter une telle vie. En 1991 Pan Néchaiy a reçu le diplôme de guérisseur et à partir de ce moment, on peut dire qu'il a commencé exercer officiellement son « métier » de guérisseur dans les Carpates et en Galice (l'ouest de l'Ukraine).

- Quelles souffrances cherchent à chasser les gens en venant chez vous ?- continuais-je de l'interroger.- Où pour que ma question soit plus claire, dites- moi, desquelles maladies pouvez – vous les quérir ?

- Il faut dire avant tout que je pratique mon art de guérir voilà déjà 40 ans. Sous le régime soviétique, je guérissais clandestinement : les gens venaient chez moi la nuit et repartait avant l'aube, ni vus ni connus. Mais l'autorisation de recevoir les malades chez moi ouvertement est relativement récente. Je me rappelle qu'on a fait venir chez moi une femme malade d'une maladie qui fait apparaître sur la peau les plais dures comme l'écorce d'un arbre. Et lorsqu'elle était guérie, j'ai appris qu'elle était la femme d'un ministre de Kiev. Après quoi, le préfet de notre région est venu pour me dire : « Recevez les gens tranquillement, le grand-père, personne ne vous l'interdira ».
C'est vrai qu'aujourd'hui, beaucoup de guérisseurs promettent de guérir toutes les maladies même les cancers. Quant à moi contrairement à eux, je ne fais jamais les promesses pareilles, je ne peux pas garantir à un malade que je vais le guérir. « Si le Dieu m'aide, je vous aiderai », je le dis toujours. Parce qu'il existe deux sortes de peine noire : l'une vient des gens, l'autre - de Dieu. Dans le premier cas, je peux détourner le mal et rendre la santé physique et même psychique par des incantations ou en faisant le recours aux herbes. Mais dans le deuxième cas, il n'y a que la prière sincère du souffrant lui-même qui peut être efficace. L'homme atteint par cette peine doit se purifier tout seul. Dans le récipient sal personne ne verse l'eau propre. Le Dieu n'entre pas dans l'âme impropre d'un être humain.

C'est ainsi, tous ceux qui ont été guéris par le molphar Néchaiy, ne doivent jamais oublier que toutes ses incantations le guérisseur commençait par rendre le salut à Dieu : « Le Saint Dieu ! Toi qui dirige et fais bouger le monde, guide et moi ! ». Et les gens dont les âmes étaient possédées par les forces noires, trouvaient la guérison près du grand-père Néchaiy : et les survivants de l'Afghanistan, dont les âmes étaient toujours en guerre et même ceux qui ont fait la preuve de l'héroïsme au Tchernobyl, il guérissait les tous et ceux qui ont subit la contamination par les rayons radioactifs et ceux qui l'ont subit par la mauvaise parole. Encore, Molphar savait faire de la sorte que le bonheur, l'amour et la paix perdus auparavant, étaient du retour dans une famille. Mais, il est impossible de tout évoquer ici. Pourtant, il n'y a pas si longtemps il a faillit d'être affronté à un nouveau problème. Un homme d'affaire lui a demandé de l'aide : je n'ai plus de succès dans les affaires, disait-il, j'ai plein de dettes et ma marchandise ne se rentabilise plus...

-Vers mes sept ans, j'ai commencé à sentir en moi, mon don de guérir, poursuivait le molphar Néchaiy. – Une fois, lorsque je n'étais encore qu'un enfant, avec les autres garçons du village nous étions en train de mener nos brebis au pâturage soudainement, un de mes camarades bergers s'est mis à saigner du nez. Qu'est ce que n'a pas été essayé pour arrêter le sang :et les tampons salés et les compresses de l'eau froide, rien n'aidait. Alors, je me suis approché de lui et j'ai touché légèrement son nez, sur le champ, le sang s'est arrêté de couler. Par la suit, quelque chose de pareille m'est arrivé : les bûcherons coupaient du bois dans la forêt et un entre eux s'est coupé la main. Cette fois ci, j'ai aussi réussi, d'arrêter le sang rien qu'en touchant la plaie. Et maintenant, on m'invite souvent dans les cabinets gynécologiques quand il faut arrêter du sang.
Plus tard, ma grand-mère Anna Dénéciv m'a appris, des plantes médicinales, et leurs pouvoirs. Elle montait avec moi dans les montagnes et me transmettait toute sa sagesse. C'est près d'elle que j'ai appris que le long d'un sentier pousse « la plante de l'amour » en russe on l'appelle « mangetca ». A Saint Jean, on en fait des breuvages, avec lesquels, les filles charment les garçons ou le contraire, les garçons charment les filles. Et si une femme cueille la rosée de cette herbe tous les matins, son visage ne connaîtra pas une seule ride jusque l'âge de 70 ans. On trouve aussi dans les montagnes une plante à la fleure blanche, qui rend le corps humain attirant ou encore, la mauvaise herbe qui tue les poissons dans les rivières et les lacs. La cueillette des plantes médicinales est toute une science. La plante comme tout ce qui vit, a les biorythmes positifs et négatifs, selon des heures de la journée son pouvoir se renforce ou s'affaiblit. Il faut savoir non seulement le jour quand on peut cueillir une plante mais aussi l'heur de la journée ou de la nuit. Quand tu vas cueillir des plantes, il faut t'y préparé moralement en avance comme le fait le peintre avant dessiner son tableau. Il faut engager la conversation avec les plantes, il faut s'incliner devant elles, et leurs demander pardon, les rassurer en leur promettant qu'elles vont servir pour rendre la santé aux gens.

La grand- mère de Néchaiy est morte en 1942 de la famine. La période de la guerre évoque chez le grand-père Néchaiy les souvenirs les plus terribles de sa vie. « J'ai connu, à ce moment, le goût amer de la faim, du froid et de la peur, nous a-t- il avoué. Dans ces temps difficiles de la guerre la maison de la famille de Néchaiy était cambriolée. Parmi tant d'autres choses volées de la maison étaient des livres ecclésiastiques et surtout un livre antiquaire ( autrichien, de la période de l'empire Austro- Hongroise)) sur la magie, c'est justement ce livre qui a initié le jeune Méchailo dans les secrets de la science occulte.

Le molphar n'est pas simplement un guérisseur- racontait le grand-père Néchaiy. En Galicie, depuis des siècles, on appelle ainsi des sorciers qui ont les pouvoirs surnaturels. Le mot « molpha » est d'origine française, et signifie « un objet enchanté ». Autrement dit, j'ai des connaissances sur les herbes médicinales et je connais les sciences occultes aussi.

- Je me rappelle, quand vous étiez invité pour le premier festival « Cervona routa », ou vous devriez, sois disant, faire durer le beau temps...

- Il est vrai que durant sept jours, j' « entretenais » le beau temps. A cette époque, il pleuvait partout en Ukraine, mais pas en Cernivtsi, où il faisait un temps magnifique, durant mon séjour là-bas. A ce moment, j'ai péché contre Dieu, car je n'ai pas le droit d'utiliser mes pouvoirs sans que ça soit une extrême nécessité. Par exemple, si maintenant devant vous, pour m'amuser, j'aurais commencé de faire partir les nuages ou faire apparaître le feu sans rien, j'aurais du me mettre de la côté gauche pour cela. Et même si, je connais la magie noire tout comme la magie blanche, je ne ferais jamais rien des mauvaises intentions. On ne peut pas être le serviteur de deux seigneurs en même temps.


- Comme vous avez abordé le thème du péché, j'aimerais vous demander, est-ce que vous vous confessez devant un prêtre ? Et en général, comment les hommes de l'église vous regardent ?

- Ceux qui ont plus de l'intelligence du cœur que les autres, savent que la magie est une science très ancienne, d'où la médecine a pris sa naissance. Et lors de la confession ils ne me demandent que si j'utilise mes pouvoirs uniquement pour faire le bien. Il y a bien sûr, ceux qui disent que si Dieu a décidé que ça soit ainsi, on ne doit pas intervenir pour changer les choses, surtout au moyen de la magie. Tandis que moi, je crois que Dieu a donné le droit au bonheur à tout le monde. Mais les forces noires gâchent la vie des gens, elles s'en mêlent dans leurs vies et leur font du mal.
- Mais qu'est-ce que c'est, au juste ces forces noires ?

- Vous devez pensez que je vous raconte des histoires, mais les sorcières, les vampires, les mages noirs existe pour de vrai. La sorcière par exemple, on peut reconnaître très facilement. Pour cela, il existe quatre signes. Avant tout, il faut regarder attentivement dans ses yeux. Dans ses iris un être humain se reflète à l'envers. Deuxièmement son regard est maléfique : si la sorcière a jeté son regard sur la bétail ou sur un enfant avant l'aube, ce dernier mourra bientôt. A part ça, sous ses aisselles et sur son sexe, la femme de cette espèce n'a pas des poiles, sa peau dans ces endroits est lisse et douce comme chez une fillette de cinq ans. Et souvent derrière, elle a une petite queue, ou plutôt une espèce de gros bouton qu'on appelle « coustrats », plus il est gros et plus la vie de la sorcière est longue. Et pour enlever le pouvoir de la sorcière il faut la régarder à travers d'une « gromovétsia ». Vous allez me demander, qu'est-ce que c'est, suivez –moi, je vais vous la montrer.

Enfin, j'ai franchi le seuil sacré pour entrer dans les appartements du molphar dans sa maison, c'est ici qu'il pratique ses rituels magiques. Tout me semblait mystérieux et bizarre et les pierres aux pouvoirs magiques et les mots du vieux molphar qui a commencé à nous révéler certains de ses secrets. J'ai vu gromovétsia, (le mot en ukrainien est un substantif au féminin dérivé d'un autre substantif « grom » désignant l'orage qui est, en ukrainien tout comme en russe, est au masculin) cet objet qui incarne le pouvoir de molphar est une branche tombé de l'arbre lors d'un orage où la foudre a fait un trou, et c'est justement cette ouverture faite d'une manière naturelle qui est dotée de vertus magiques. Ensuite Néchaiy nous a montré la croix faite du pin, une arme infaillible contre les mauvais esprits. Et enfin le couteau - gradivnék (« gradivnék dérivé du mot « grad » qui signifie la grêle). C'est justement avec le gradivnék que le molphar peut faire disparaître les nuages. On le fabrique d'une manière très originale : à l'aube, il faut sortir tout nu dehors et se mettre derrière la maison, découper le gradivnék de la faucille et il faudra le bénir à la Paque. Encore molphar nous a fait sortir la bille de vipère, c'est une espèce de la petite bale dure que les vipères regorgent à travers d'une pierre, après quoi un trou d'une forme irrégulière se forme dans la pierre. « Si quelqu'un a soufflé sur une jeune fille à travers de cette bille, nous a expliqué molphar, les garçons la contourneront jusqu'à la fin de ses jours comme l'eau d'une rivière contourne la prière à son passage ». La pierre avec le trou est aussi aux pouvoirs magiques, elle nous a été démontrée aussi. On trait les vaches à travers ce trou pour les protéger contre le mauvais sort envoyé par des sorcières. Mais pour la fin, il nous a réserver un vrai miracle –un gigantesque quartz. « C'est une pierre blanche, a commenté molphar, qui purifie l'homme. »
Sur la table, il y avait l'eau bénite de quatre lieus sacrés : de Jérusalem, du monastère de Pocciaev, de la montagne d'Anna, et de Zarvanétsia (ces trois derniers lieus se trouvent en Ukraine) et aussi un pot en ver avec du sucre en poudre, ce dernier m'a beaucoup intrigué.

- Avec le sucre je fais des incantations « sur l'amour », nous confiait le sorcier. – Pour obtenir l'amour d'une jeune fille, il faut lui faire boire, à son insu, du sucre sur lequel les incantations ont été lu auparavant, dans n'importe quel boisson dans la période entre la nouvelle et la vieille lune.

- C'est comme ça que vous avez conquis le cœur de votre femme ?

- Vous savez ma femme est d'une famille tsigane ... mais la magie n'a joué aucun rôle dans notre mariage, ni de son côté ni du mien.


Encore, le vieu Néchaiy nous a parlé de la guimbarde et cela aussi, était une découverte pour mo. Avant, je n'ai jamais entendu la musique vivace qui sort de cet instrument. Mais dans les mains de molphar, de suite, il se transformait en un objet aux vertus magiques.

- La guimbarde est le seul instrument musical qui ne vient pas de Dieu, - a dit molphar. Le violon était aussi inventé par Satan, mais quand le créateur maléfique a fait le signe de croix avec l'archet pour sortir un son de sa nouvelle création, il était obligé de le donner à Dieu. Quant à la guimbarde, elle était souvent utilisée pour les rituels magiques. Tout ce qui vit, a sa vibration propre, et l'essence primordiale de toute existence est le son vibrant « aoummm ». Avec la guimbarde il est possible de reproduire les sons qui peuvent faire écarter les montagnes.

- Pan Mékhailo, depuis quand vous sentez-vous d'être un vrai molphar ?

- Une fois je mirais le ciel parsemé des étoiles, quand d'un coup j'y ai distingué mon ombre. Seul, celui qui a vu son ombre au ciel est le vrai mage.

- A part votre grand-mère, est-ce qu'il existait un autre maître, un autre homme qui vous a transmis ses pouvoirs magiques?

- Même maintenant, j'ai un guide...une fois par an pour le mercredi noir (celui qui est avant la Paque), j'entre dans le transe, en consommant le boisson préparé à la base des herbes hallucinogènes. A ce moment, je passe dans une autre dimension et je communique avec un esprit qui me donne les directives à suivre. Je crois que cette créature avec laquelle j'ai un lien spirituel, est le martyre Ponteleimon, il était guérisseur, reconnu par l'église orthodoxe comme un saint. A par lui, j'ai toujours auprès de moi mes compagnons fidèles tels comme le feu et l'eau, ce sont deux puissances que je vénère.

- Et quant aux élèves ?

- C'est vrai qu'en période d'un an, je peux apprendre à une personne la clairvoyance. Tous les gens sans exception, possèdent un informateur universel – c'est notre subconscience. Et l'avenir n'a plus de secrets pour l'être humain qui a su la maîtriser. N'importe qui peux provoquer les rêves prémonitoires. Chacun peut devenir maître de son avenir. Mais l'essentiel, c'est de positiver et ne jamais perdre de la foi et de l'espérance, c'est cette foi au bon au positif qui nous sauve. Dommage qu'aujourd'hui, beaucoup ont perdu une telle foi. J'aurais pu transmettre mes connaissances à un élève mais malheureusement je n'ai pas encore rencontré la personne qui met l'amour pour son prochain au dessus de l'amour pour l'argent et la gloire. Je commettrais un grave péché si je confie mon savoir à celui qui n'est pas digne de le recevoir. Et pour moi, aujourd'hui, il est temps de penser à l'autre vie, à la vie éternelle plutôt que me soucier de mon avenir terrestre.

- Notre conversation avec le molphar Néchaiy durait encore longtemps, et quand on suivait le sentier qui nous a fait monter aux montagnes et après encore et encore sur les cimes rocailleuses des montagnes où nous nous sommes installés assis pour nous reposer de notre « randonnez pédestre » et mon interlocuteur n'arrêtait pas de me surprendre en me faisant découvrir son monde à lui, étrange et fantasque. Et je n'arrivais toujours pas à comprendre pourquoi on appelle les pouvoirs de molphar « surnaturelles » car toutes ses actes et tous ses mots sont profondément naturels, comme le sont les arbres, les plantes, les pierres, tous ces éléments naturels qui lui procure de la force. Une grande beauté d'intérieure se faisait sentir en lui et je me suis encore une fois répété ses mots qui me semblent être, la clé de son âme : « Il faut aimer les gents avant tout, avant les richesses, avant la gloire. Et il n'y a que celui qui porte cet amour dans son cœur qui peut devenir guérisseur et peut guérir les gents »...
[ Ajouter un c

L'interview avec le molphar de Carpates, Mékhailo Néchaiy


Est-il vrai que vous êtes descendant du colonel Danilo Néchaiy ?

- Effectivement, je suis descendant du colonel de Bratslav, Danilo Néchaiy. Il est enterré dans le village Krasne, près de Vinétsia. Il connaissait les sciences occultes et était guérisseur populaire. Danilo Néchaiy avait deux fils : Ivan et Iura. Le premier était exilé par Katrine II en Sibérie, où il a perdu à jamais sa liberté en y laissant sa vie. Le deuxième s'est enfui en Volochina et ensuite en Boucovina dans une région de Charnivets d'où justement commence mon arbre généalogique du côté paternel. Et même si je suis né en Goutsoulchina dans les Carpates, mes racines sont de Zaporojie.
Bayda Véchnevetskiy celui qui a fondé la Setch zaporogue, et le célèbre ottoman (le mot du provenance turque, dans le contexte historique des cosaques ukrainiens désigne celui qui commande une armée) Ivan Sirko, sont parmi mes ancêtres. Leur noms font gloire de l'histoire ukrainien, grâce à tels historiens comme : Iavorétskiy, Antonovitch et Grouchevskiy. Et Danilo Néchaiy et Bayda Véchnevetskiy et Ivan Sirko étaient les profonds caractérologues à sa manière, et possédaient des pouvoirs surnaturels.

Expliquez nous qu'est-ce que vous voulez dire par « des caractérologues » ?

-C'étaient des personnes, qui avaient de l'esprit ouvert avec des connaissances des lois de la nature. Ils étaient aussi des prophètes et des voyants. Bref, ils pouvaient voir l'avenir très lointain dans des milliers années à venir. Ils faisaient des horoscopes. L'église a interdit de le faire, contestant que cela vienne du diable. Mais en vérité, le caractérologue par la nature et non par la science, c'est un homme juste et droit, une personnalité profondément spirituel qui aime la nature animée et non animée et le monde autour de lui, son premier devoir c'est de faire du bien et l'apporter partout avec lui. Ainsi, cette énergie de l'amour qu'il dégage, se retourne cent fois plus forte qu'elle était au départ et fait naître en lui, une puissance exceptionnelle, une puissance universelle. Le plus important dans la fonction d'un caractérologue, c'est qu'il doit être au service de Dieu et des gens sans chercher à en tirer un profit matériel quiconque. Un tel individu doit sans arrêt faire attention à son monde intérieur, l'enrichir tout le temps car il n'y a que l'esprit qui est éternel. Ici, dans les Carpates, on nomme des caractérologues, les « molphars ».
Un molphar est un sage, celui qui a le pouvoir du mot et de la magie. Je suis le dernier représentant de cet ancien monde des Carpates. Tous mes « confrères » sont déjà morts. J'ai 77 ans. Je me suis entièrement voué au service des gens. Toute la journée, j'accueille et je soigne ceux qui viennent jusqu'à moi. Je dors deux ou trois heures par jour et ne me nourris qu'une fois. Toute l'énergie que je donne aux gens, me revient directement de l'espace cosmique.
Un Molphar doit être exceptionnellement spirituel parce qu'il s'adresse perpétuellement au Dieu et aux Hautes Puissances Célestes demandant leur aide. Si un molphar commet de l'injustice et agit contre les lois de la Nature, en punition il peut perdre ses pouvoirs magiques.


Est-il possible de pouvoir expliquer la provenance du mot « molphar » ?

-Ce mot provient de l'ancien terme « molpha » qui désignait l'objet enchanté (sur lequel on a pratiqué de la magie). Mais le pouvoir essentiel du molphar est dans ses mots et ses chants. Tout de même, un molphar peut faire également le bien comme le mal, tout dépend de son choix. (L'interviewé se contredit, maintenant, il n'est plus question de la punition mais du choix) Chaque molphar a son propre style de travail. Chez certains, les connaissances de la magie sont innées, ceux-là sont les molphar d'une longue tradition familiale. Les autres sont fruits de l'apprentissage. Les uns se penchent vers la magie noire, les autres vers la magie blanche.


Et quant à vous, vous êtes né avec vos pouvoirs où vous les avez appris près de quelqu'un ?


-Mes pouvoirs sont de Dieu. Pour tout vous dire, mon éducation scolaire s'achève à ma sortie de l'école secondaire, pourtant, j'ai l'autorisation de donner les cours magistraux à l'université sur la psychologie humaine, sur la sexologie, sur la philosophie, sur la démonologie, sur les religions.

Est-ce que vous avez eu quand même un professeur réel, en chair et en os, ce qui concerne de votre art, de votre vocation ?

-Non, je n'en avais pas. Déjà âgé de sept ans, je pouvais arrêter une hémorragie chez un homme. Souvent, même on m'appelait, pendant les opérations quand il avait une perte du sang importante, chez un patient, que le corps médical, n'arrivait pas à arrêter mais moi, je la stoppait nette, car je peux arrêter du sang rien qu'avec les mots. Le sang m'obéit ou plutôt, à mes incantations. Je m'adresse à tous les organes en particulier, et ils exécutent mes ordres. C'est une force secrète.

Est-ce que vous avez des élèves ?

-Non, malheureusement. Je veux énormément en avoir un mais, avant tout, j'écoute ce que me conseillent les esprits. Quand quelqu'un vient chez moi et me demande de devenir mon élève je contacte l'esprit ou ce qu'on peut appeler mon guide spirituel de l'au-delà. Et si mon guide me dit que le prétendant aime de l'argent plus qu'il ne l'aime l'homme, alors, c'est non car les escrocs de ce genre, il y a en a assez comme ça. Je n'ai pas besoin d'un tel élève. Gagner de l'argent sur le malheur des gens est un grand péché. Comme vous pouvez le voir, je vis dans la pauvreté même alors que beaucoup de monde vient chez moi pour se faire soigner par mon art. Parmi mes visiteurs, il y avait même, les députés du Haut Conseil Administratif d'Etat, les généraux, les journalistes, et les hommes du cinéma. Mais ne pensez surtout pas, que j'en profite. C'est comme si une main invisible appuyait sur un bouton lors de la première rencontre avec mes visiteurs pour que le contact s'établisse entre eux et moi. Ainsi, je regarde si mon nouveau visiteur est digne d'être aidé, s'il fait du bien pour les autres. Les égoïstes, les hommes à mauvais caractère, je n'ai pas besoin d'eux ici. L'être humain doit avoir de bonnes intentions, être juste et droit par ses actes et par ses pensées, il doit aimer la nature.
Je demande à Dieu, pour qu'un jour, avant que la mort n'est pas venue chercher le grand-père que je suis, il m'arrive de rencontrer un élève ou une élève digne de confiance à qui j'aurais pu transmettre mon art, mon métier. Mais pour l'instant, il n'y a personne qui puisse prendre le relais de cette vocation, les humains aiment de l'argent et non des humains.

En quoi est au juste votre force ?

-Je suis le Seigneur du mot. Mon mot est plus puisant qu'une balle du pistolet, car une balle peut rater sa cible tandis que mon mot – jamais, il atteint toujours l'objectif déterminé. Il n'existe pas la personne dont la psychologie je ne puisse saisir et capturer. Je fais parvenir à l'homme la force qu'il doit apprendre à maîtriser. Ne pensez pas que je vous parle pour rien dire. Mes paroles ne sont pas vides leur poids est lourd des siècles d'expérience humaine. (Regarder Esquisses de la myhtologie de Dumézil le chapitre sur Vac). Je porte cette tradition jusqu'à mon dernier soupir. Mais si Dieu veut bien me donner un élève, je serais très content. Sinon, toutes mes connaissances seront enterrées avec moi lors de ma mort. Comme c'était le cas de mes « confrères ». Il y avait un guérisseur, prophète, et voyant Chostac Vassél Ivanovitch dans Urievo-Korolovtsi, le district de Gorodianskiy dans la région d'Ivano-Francovsk, ça fait maintenant deux ans qu'il est mort.
Dans les Chechourakh, le district de Kosivskiy, pratiquait un « goy » (un sage, un guérisseur), il pouvait dire tout de suite, qu'est-ce qu'on vous a fait (il s'agit sûrement d'enlever le mauvais œil ou le sort jeté par une personne mal intentionnée), lui, il est aussi mort. Je reste le dernier des molphars.
Je vais vous conter une anecdote. En Boucovina, dans la région de Tchernivets, vécut un homme qu'on appelait Taradouda, il faisait des miracles. Une fois, il advient qu'il se trouvait sur un pâturage avec un couteau caché dans sa ceinture. Et voilà qu'une compagnie de bûcherons viennent à sa rencontre, ils étaient épuisés, après avoir marché trois jours de suite, pendant lesquels ils n'avaient rien mangé. Taradouda s'adressa à eux : « Qu'est-ce que vous arrive les bons gens ? ». Ils lui répondirent : « Nous sommes affamées comme des chiens ». En entendant cela, il leur demanda de se mettre près d'un sapin, sortit son couteau, le planta dans l'arbre et leur dit : «Approchez vos chapeaux, par ici ». Un des voyageurs approcha son chapeau et il se remplit du lait qui coula du sapin. Les six hommes purent calmer leurs soifs, mais pour le septième, il ne restera plus rien à boire. Alors, Taradouda regarda sur une montagne voisine où il savait l'autre pâturage pour le bétail, et parla ainsi : « Si cette cargaison vaut le coup, le lait ne tardera pas à couler mais si non, le sang apparaîtra à la place. » et c'était le sang qui s'effila. Voyant le miracle, un des bûcherons demanda : « ô mon bon compère, apprends–moi ton art que tu vient de nous démontrer ici ». A ce-là Taradouda répondit : « C'est un énorme péché de faire ce que je fais. Je préfère garder ce poids pour moi tout seul, je ne cherche pas de m'en débarrasser et je ne peux pas vous en charger en vous révélant les secrets de mon métier ». Et il se tût sans partager son poids et son secret.
La nature est riche en phénomène, qu'elle cache des humains. Plus la civilisation grimpera vers le sommet de son apogée, plus la Nature Mère se méfiera, s'enfermera de l'homme.


On dit de vous que vous êtes à moitié chrétien, à moitié païen. Comment c'est possible ?


- C'est juste, d'une part, je suis de foi orthodoxe et comme tel je vénère toutes les puissances célestes telles que Le Seigneur Dieu Unique, la sainte trinité, la sainte mère de Jésus Christ, Jésus Christ lui-même, et tous les saint qui ont souffert pour la foi chrétienne, d'autre part, je m'incline tout autant devant la Nature Mère, parce que je vis dans la nature , c'est par elle que suis venu au monde, et c'est elle quand lors viendra me prendra. N'est-il pas vrai que la terre aussi digne du respect et de l'adoration, cette terre sur laquelle vous vous tenez débout et qui absorbe de vous le mal et le bien tout comme une mère fait avec ses enfants, avec le fruit de son ventre. Chaque salut est un salut à la terre. Quand les cosaques partaient pour la guerre contre les suppôts : tous, ils prenaient avec eux une poignée de la terre natale cachée près du cœur, et si la mort les surprenait sur la terre étrangère, c'est cette terre de la patrie qui couvrait leurs corps morts. Nous, n'avons même pas conscience à quel point la tradition païenne est encrée en nous. Nous l'avons oublié. Pourtant, ne pas aimer la Nature, c'est comme renier sa propre mère, cette mère qui nous a mis au monde. Jésus Christ a dit qu'il est venu sur terre pour rajouter le nouveau testament au vieux. Rajouter et non pas détruire. Parce que si vous anéantissez les anciennes croyances, vous ruinez le fond. Et sans fond toute construction, tout bâtiment ne tiendra pas.


Mais tout de même, les païens vénèrent les dieux qui n'ont rien avoir avec le christianisme.

- Ce sont les mêmes puissances sauf qu'on les appelle différemment.

Mais si le Dieu est unique pourquoi dans toutes les religions du monde entier, il a y tellement des contradictions ?

-C'est ainsi que c'est doit être. Chacun sera jugé par ses actes et non par son apparence, par ce qu'il croit d'être. Chaque personne est un monde à part. Par exemple, si deux peintres vont peindre le même paysage, leurs peintures seront différentes. Cela dépend de la psychologie de l'homme.

Mais, les prêtres bannissent les idées pareilles.


-Aujourd'hui je ne croit plus aux prêtres. Avant, les prêtres étaient plus spirituels que maintenant, ils avaient peur du péché et étaient sûrs de leur foi. A notre époque, ils ne craignent plus le péché et ne font que porter orgueilleusement leurs robes de saints. Et quand un pauvre entre à l'église et demande au prêtre quelques misérables kopecks, le prêtre réponde : « Vas demander à Dieu, c'est lui qui te donnera », et jamais il ne sortira de la monnaie de sa propre poche pour la détresse humaine. C'est parce qu'il a la conscience d'un capitaliste ordinaire dont le but est d'acheter une voiture d'une marque étrangère. S'il compatissait vraiment aux souffrances d'un malheureux, il aurait donné son dernier kopeck. Et c'est plutôt le pauvre que le riche qui aidera le pauvre. Le Seigneur Dieu disait que plutôt le chameau se faufilera à travers le chas d'une aiguille que le riche entrera dans le Royaume Céleste. Souvent la richesse et la luxure vont de pair. Ce qui nous allume de l'intérieur, ce qui fait vibrer notre âme ne s'éteindra jamais. Je n'aime pas les hypocrites.
Il faut rester toujours fidèle à soi-même : sois soi-même ! Parmi les prêtres, il y a ceux qui sont dignes de respect, qui ont su forger leur âme et leur vie, de la façon que le charnel s'efface et que le spirituel triomphe. Mais, ils sont si peu nombreux qu'on peut les compter sur les doigts de la main. C'est avec ceux –là que vous pouvez vous confesser sans crainte. Si non, c'est pas la peine, et confessez- vous lors de la confession commune de la Pâques. Le Dieu vous pardonnera les péchés dont vous vous repentissez et dont vous ne répéterez pas. Mais si vous vous confessez devant un prêtre qui n'est pas meilleur que vous dites- moi alors : « si l'idiot peut être du bon conseil à un autre idiot ou un affamé donner de la nourriture à un autre affamé » ? Un tel prêtre va vous dire que le Saint Esprit est avec lui. Mais montrez moi un être humain qui a le Saint Esprit à ses ordres, et sûrement, ce n'est pas un imbécile ecclésiastique de ce genre qui pourra être doté d'un tel pouvoir. Ecoutez plutôt votre cœur pour distinguer la justice de la bêtise. A l'époque on n'hésitait pas à verser son sang pour la justice et aujourd'hui on ne sait plus la respecter.

L'histoire sous le point de vue païenne doit prendre tout autre aspect que la conception classique ne lui donne ?


-Même si on les appelle les païens, il serait plus juste de dire : les adeptes de l'ancienne religion ou de la religion antique, car ils raniment la tradition religieuse d'autre temps. On nomme du saint, Volodimir le Grand mais pour les adeptes de la vielle foi, il est le coupeur de têtes sans pitié, c'est justement à cause de lui que notre peuple porte un karma bien trop lourd. Il a tué tous ceux qui n'ont pas voulu se convertir au christianisme. Mais, dites –moi, si vous êtes un fidèle adepte d'une religion qui vous a été transmis avec le lait maternel et vous ne voulez pas la trahir pour une religion venu de l'étranger, peut-on vous priver de vie à cause de cela? C'est pourtant ce que faisait Volodimir le Grand : il forçait son peuple de se convertir à la foi chrétienne orthodoxe, en colorant les eaux bleues de la Dniepr en rouge, du sang versé de ceux, qui en persistant dans les vieilles croyances, faisaient obstacle à son projet politique. Voilà d'où nous vient ce karma familial (voir national). Dieu a privé de la raison les fils de Volodimir, pour lesquels, il a laissé la Russie kiévienne, et ses fils ont commencé à mener les guerres entre eux, en conséquence notre état est devenu affaibli. Voilà à cause de quoi nous sommes devenu les esclaves des mongols, des tatars et des turques. De cette époque terrible jusqu'aujourd'hui nous n'avons pas encore fini avec notre mauvais karma.
Il y avait un écrivain qui disait : « celui qui ne connaît pas le passé n'est pas digne de l'avenir ». La nouvelle génération ne connaît pas le passé, l'histoire. Il y avait un temps quand les houtsouls connaissaient leurs arbres généalogiques jusqu'à la septième branche, et maintenant, il est rare que quelqu'un se souvient du nom de son arrière grand-père. A qui en est la faute ? Bien sûr, c'est la famille qui est responsable de ne pas avoir transmise l'histoire familiale à la nouvelle génération. Il faut s'intéresser aux anciennes traditions des peuples du monde entier et avant tout à la culture traditionnel du peuple d'où nous venons d'où viennent nos racines. (La tradition ancestrale). Quelle nation pouvons–nous former, si nous avons perdu notre langue maternelle? La langue est la carte d'identité du peuple qui le parle. Et même si dans vos veines coulent le sang ukrainien mais vous ne connaissez pas l'ukrainien, vous n'êtes pas un ukrainien (les propos trop pro nationaux). Il n'existe pas un seul peuple sans sa langue nationale, même les tribus sauvages ont leur propre langue. La honte au peuple qui a oublié sa propre langue ! Les russes ont-ils oublié leur langue ? Quant aux ukrainiens, il y en a beaucoup qui ont oublié l'ukrainien.


Et la prière, qu'est-ce qu'elle représente pour vous ?

-Je veux que vous sachiez que le Dieu accepte uniquement la prière qui vient du cœur et non pas de la raison (Logos/ mithos) Pourquoi est-ce donc ? Parce que, quand c'est votre raison qui vous dicte votre prière, le diable à ce moment embrouille vos pensées d'un quotidien gris, et le Dieu rejette une telle prière. Pourquoi pensez-vous les gens viennent en foule à l'Eglise ? Parce que dans la foule, il y a peut-être une ou deux personnes qui prient avec leurs cœurs. Et même si dans cette foule qui prie, il n'y a qu'un seul homme de cœur le Dieu envoie sa miséricorde sur tous. Mais les gens qui prient avec leurs cœurs sont ceux qui ont connu les souffrances du cœur, les souffrances morales.

On me vous a également recommandé, comme le spécialiste de la démonologie...

-La démonologie est une science sur les esprits, sur les énergies qu'on ne peut pas voir avec l'œil humain. Mais si un esprit d'un mort ou le diable passe à côté de vous, vous ressentez l'inquiétude dans votre cœur.

Comment les démons agissent sur les gens ?

-Le démon suprême est Lucifer qui a été chassé du paradis par le Seigneur, mais il a été doté de toutes les connaissances d'une divinité et il les a gardé même après son excommunication du royaume céleste. Les corps des êtres humains se composent de la terre, et le corps de Démons - du sable. Lucifer envoie les démons chez tous les hommes. Sur l'épaule gauche, les hommes portent le Diable, sur la droite- l'ange. L'ange vous garde du mal, entre lui et le démon c'est un combat éternel. Si vous regardez l'image dessinée de l'archange Nicolas (« Mikhail »), le chef des guerriers de Seigneur, vous verrez qu'il tient dans sa main gauche une balance. Cette balance symbolise les épaules humaines de quel côté elle se penchera : du gauche ou du droit, tel côté gagnera chez un être humain c'est un combat personnel qui dure toute notre vie. En propageant du bien autour de vous et même devenant le martyre, l'ange gardien vous soutiendra et après votre mort vous irez directement au paradis. Mais si vous semez du mal, c'est l'ange noir qui viendra chercher votre âme pour la jeter dans le feu éternel. C'est la loi pour tout le monde même si vous n'êtes pas croyant. Comprenez cela comme vous voulez. Le Dieu nous a donné la liberté du choix et du raisonnement. C'est avec votre tête que vous devez vous décider avec qui vous êtes. Vous pouvez être avec le diable en devenant le sorcier de la magie noire. Vous détesterez, et la nature et l'homme. Mais avec le diable votre raisonnement ne sera pas le votre mais celui du malin, et vous ne ferez qu'obéir à ses ordres.


Beaucoup de monde vient chez vous avec leurs problèmes. Comment réussissez-vous de préserver la pureté de votre âme ?

- Je ne mange pas de la soupe, du borche (soupe ukrainienne à la base du bouillon du porc), les concombres, les tomates, de la graisse, de la viande. Et la graisse animalière et la viande, ce sont des matières mortes, les manger c'est comme manger de l'homme. Il ne faut pas manger du mort, car il contient de l'énergie négative. Quand l'être humain se nourrit avec de la chair morte, son caractère devient grossier et brutale, il s'éloigne du Dieu. Je mange une seule fois par jour de la bouillie maigre dans la quelle j'ajoute deux ou trois gouttes d'huile végétale. Je suis un drogué au café. J'adore le café et j'en bois depuis plusieurs années.
Une fois dans l'année j'entre dans une grotte pour vingt jours successifs, je me plie de la sorte que ma position imite celle de l'enfant dans le ventre maternel, je perds tout le contact avec la réalité je débranche ma mémoire, ma respiration et je reste ainsi sans bouger sans manger et boire. Si quelqu'un avait décidé de vérifier mon pouls, il aurait pensé que je suis mort. Pour pouvoir le faire, j'ai du m'entraîner durant des années. Pourquoi faut-il que je le fasse ? Parce que tout au long de l'année, les gens viennent me voir avec l'énergie négative de leurs malheurs. J'absorbe toutes ces ondes noires. Et pour m'en débarrasser pour me purifier, je m'enterre dans une grotte. Si quelqu'un sans entraînement avait voulu de me suivre, il n'en aurait pas ressortit vivant.

Pourquoi les gens tombent-ils malades ?

-C'est leur karma.

Comment, alors, comprendre qu'est qu'on peut guérir et qu'est ce qu'on ne peut pas ?

-Il faut regarder le destin de l'homme. Chacun a son « livre ». La science nous apprend que le destin de l'homme est entre ses mains. C'est un pur mensonge. Cela n'existe pas. Dites-moi, alors : « Qui veut séjourner en prison, ou être infirme, mourir avant l'heure, avoir la vie dure travaillant sans arrêt pour les faibles revenus » ? Personne. Pourtant, c'est la réalité pour des nombreuses personnes car c'est ainsi que cela a été prescris dans leurs livres du destin. (La signification du destin en Corse, le fatalisme corse , ici le point comparable). Et il nous ne reste qu'accepter notre destin.

Alors, avons-nous vraiment la fameuse liberté de choix ou même une faible part de cette liberté ?

Non nous ne l'avons pas. Le destin détermine la duré de votre vie. Vous n'avez pas à craindre ni la noyade, ni l'incendie, ni l'ennemi, jusqu'à ce qu'il vous est prédestiné de vivre. Quand viendra votre heure, vous allez vous retrouver dans le lieu, où vous devez mourir et personne ne pourra vous aider, ni les hommes, ni Dieu, parce que c'est le destin écrit sur un papier mandé à l'heure où vous êtes né. Il n'y a rien de plus puissant pour l'homme que la nécessité et le temps. Le temps a le pouvoir révélateur, quand il est temps un homme devient ce qu'il doit être vraiment (autrement dit : il y a le temps pour tout : pour se chercher et pour se trouver aussi). Et la nécessité vous forcera à agir contre votre propre volonté. Ces deux facteurs tiennent l'homme sous une espèce de régime. Si le temps n'est pas venu la femme n'accouchera pas, la jeune fille ne se mariera pas, vous ne quitterez pas ce monde avant l'heure. Le destin ne frappe pas ni avant l'heure ni après, il est toujours à temps. Il arrive qu'on peut influer sur le destin de l'autre ou plutôt de freiner le cours naturel du destin de quelqu'un comme par exemple conjurer le sort d'un jeune homme en lui « mettant la couronne de célibat » ce que lui empêchera de trouver sa deuxième moitié toute sa vie. Où ce peut-être une jeune fille qui demeurera célibataire pour toujours. Mais jeter le sort c'est un grand péché devant Dieu. Personne n'a le droit de priver du bonheur son prochain. Mais la mauvaise action retombe toujours sur vous comme un boomerang. Il n'y a rien que disparaît sans trace. Une personne au destin dur sera récompensée dans l'autre monde. Celui qui a souffert sera bien heureux là-bas. Celui qui a connu seulement la richesse oisive sera maudit et malheureux après sa mort. Après la pluie, le beau temps, la pluie après le beau temps. L'été ne viendra pas sans hiver, sans hiver il n'y aura pas le printemps. Un élément s'oppose à l'autre et l'alimente en même temps. (Les couples antagonistes dans la mythologie védique et antique). Dieu fait en sorte que les natures opposées s'attirent pour former un tout harmonieux, tout dans cette vie a deux côtés différents.

Est-ce comme le yin et le yang ?

-Regardez, moi par exemple : je ne communique pas avec le Diable mais il est vrai que s'il n'existait pas notre monde n'existerait pas non plus. Dans le monde coexistent les forces (divines) blanches avec les forces (diaboliques) noires comme le minus et le plus. Entre elles c'est la lutte permanente. Les forces claires calment l'agressivité des forces sombres, notre vie sur la Terre est le résultat de cette lutte sans minus le plus n'agit pas, et le contraire. Voilà pourquoi, il ne faut pas avoir peur du Diable, mais il ne faut pas le tenter non plus.


Et quand un malade ou un malheureux vient ici et vous lui apportez votre secours, est-ce que c'est aussi le destin qui agit par vous ?

-C'est le guide de la route du destin qui les emmène vers moi. C'est Dieu qui décide comment se passera notre vie. Jusqu'à ce que vous deviez vivre vous ne mourez pas. Mais quand l'heure viendra de mourir pour un homme, il est inutile de chercher le docteur ou le guérisseur, ils n'y pourront rien.
J'étais dans l'état de l'homme à qui on a mis un diagnostic mortel. Mais je ne me suis pas préparer à mourir mais bien au contraire je cherchait la guérison là où je le pouvais...dans tout homme qui inspirait en moi la force de la foi...et je me suis guéri.
L'espoir vous guérit. L'espoir meurt en dernier chez un homme. Si vous ne l'avez pas perdu il vous trace le chemin de votre avenir. Ce sont les grandes puissances que la Foi, l'Espoir, l'Amour. La plus forte d'elles c'est l'Amour parce qu'il agit par le cœur et non pas par la tête. Ce que votre cœur a pris c'est à vous, car on ne peut pas donner un ordre au cœur, on ne peut pas l'apprendre non plus.

Est-ce que vous pouvez dire à votre patient s'il sera guéri ou pas ?

-Je n'ai pas le droit de le dire, parce qu il n'y que sa foi qui pourra le guérir avec mon aide. Le créateur de tout est la foi de l'homme. Si un homme est monté sur cette marche il montera sur la deuxième et sur la troisième et retournera à la vie, sans prendre compte de son diagnostic. Il existe des miracles que vous n'allez même pas en croire. Mais si quelqu'un vous dit qu'il peut guérir le cancer, cracher lui dans les yeux. Parce que comment un être humain qui ne connaît pas son lendemain prend la responsabilité sur l'avenir des autres, qui est de Dieu. On peut guérir uniquement avec les forces divines. Mais je ne peux pas vraiment dire que je peux guérir, une telle affirmation digne d'un escroc ou d'un charlatan. Ceux – là viennent chez moi aussi. Par exemple, vient chez moi un qui travail pour un ministre. Parce qu'un beau jour, il lui arrive de ne pas pouvoir guérir ou faire de sorte que son ministre soit augmenté au travail. Alors, une fois chez moi il me dit : « Ayez la gentillesse de m'aider car je suis à deux doigts de m'envoler de ma place bien chaude comme un bouchon de champagne, si je ne trouve pas le moyen de secourir mon patron ». Alors le lui réponds : « Pourquoi vous entrez dans un métier dans lequel vous ne pouvez aboutir à rien. Faites donc ce que vous a été appris par la science ou par votre mère. Vous ne voulez que ramasser de l'argent sur les souffrances humaines, n'est-ce pas ? Mais on ne peut pas construire son bonheur sur le malheur des autres. Et même si vous en parvenez, votre bonheur n'en sera que plus court et se brisera comme un château de sable. On peut cacher le mal des gens mais non pas de Dieu. On récolte ce qu'on a semé. Tout être humain n'a que ce qu'il mérite.
La prière et le jeûne sont les meilleurs remèdes. Parce que si un homme s'est purifié de l'intérieur dans son âme, toutes les maladies partiront définitivement.


Est-ce qu'en herbes, vous vous y connaissez aussi ?


Je suis un connaisseur des herbes avec une expérience de 47 ans. Ici il n'y a pas un coin où je ne suis pas allé. Mais maintenant, il est dangereux de se promener dans les montagnes car on y trouve beaucoup de pièges à l'ours.

En quoi est, au juste, le secret de ce pouvoir des herbes de guérir ?

-Ce pouvoir est dans leur bio force. Mais les herbes qui aident le mieux sont ceux qui poussent là où vous êtes né. Je vais personnellement cueillir des herbes pour mes remèdes. Cette affaire est très importante, la période de l'année et de la journée aussi. Certaines racines par exemple, on ne peut cueillir qu'à midi mais leurs corps - seulement le matin. Certains on doit cueillir à l'aube, certains - la nuit. Comme vous voyer chaque plante à son champ bioénergétique avec les pouvoirs singuliers dont dépend l'heure de cueillaison d'une telle ou d'une autre plante. Il existe de plantes avec les champs bioénergétiques très puissants.

Pouvez vous voir le destin d'un être humain juste en regardant sa photo ?

-Oui je le peux. La photographie est une sorte de matrice de l'homme. La photo peut être prise récemment ou il y a longtemps comme par exemple une photo d'enfance, cela n'a pas d'importance. Toute photo contient du « ciment » qui fonde la fonction primordiale de la vie.

Alors, est-ce que vous voyez l'avenir ?

-Oui mais je ne dis pas tout. Ce que l'homme peut anticiper, je le lui dis. Mais ce qui est écris dans le destin – non.

Et votre destin, le connaissez vous ?

-Oui, je le connais. Je connais même quand et où je mourrai et où je m'en irai après. Je n'ai pas peur de la mort – c'est un phénomène naturel, la force qui ne manque pas sa cible, qui doit venir vers toi comme le cadeau de mariage. Tout homme qui comprend les lois de la Nature et de Dieu ne craint pas la mort.

Vous croyez que l'âme ne vit qu'une seule fois dans ce monde ou vous croyez à la réincarnation de l'âme ?

-Je vais vous répondre sur ce qui concerne de mon âme. La dernière fois dans une autre vie mon âme s'est réincarnée en Mexique. C'était une femme responsable des instruments de musique, elle était dramaturge et écrivain. Son âme a quitté son corps pour entrer dans le mien, c'est pourquoi j'ai beaucoup de traits de caractère féminin : j'aime le sucré, le café, et je perçois les gens et la nature avec beaucoup de finesse et d'ironie. Ce ne sont pas là les mots dans le vide, je peux réellement lire vos pensées les plus intimes et dire sur vous-même ce que vous n'auriez pas dit à votre propre mère. Mais j'essaye de ne pas le faire, parce que je ne veux pas faire peur au gens.

J'ai entendu que pour rompre le lien avec son guérisseur il lui faut payer quelque chose ?

-Tout demande d'un sacrifice. Dieu a besoin que vous lui fassiez le sacrifice de la prière. Les gens ont besoin de recevoir quelque chose de vous quand ils vous ont rendu un service. Et le Diable a besoin qu'on lui paye avec le sang, parce que c'est son essence vitale sans laquelle il ne peut pas exister.

Et avec quoi, il faut qu'on vous paye ?

-Ma paye est la bonté humaine et la pureté de l'âme. Vous n'allez pas verser de l'eau propre dans un récipient sale. Dans un homme pur, Dieu verse du bonheur et de la santé. Et le contraire, si le récipient du cœur humain est sale, l'homme à qui appartient ce cœur impur, connaîtra des misères.
Je ne fixe jamais la taxe pour mes services. Je me contente de ce qu'on me donne. Et même si on ne m'a rien donné c'est le Dieu qui me donnera.

On m'a raconté aussi que vous êtes un habile musicien en plus, est-ce vrai ?

-Et oui, je suis musicien, cela fait déjà 37 ans que je suis sur la scène. Je joue sur plusieurs instruments musicaux populaires surtout sur les « trémbas » (le mot ukrainien pour désigner une guimbarde). Je suis aussi le responsable d'une troupe artistique travaillant sur les bases folkloriques, ethnographiques et artistiques. Notre troupe des musiciens trémbarivs a fait le tour du monde. Avec la musique de trémbas, je soigne également l'homme, s'il s'agit des dérangements psychiques. La magie fait partie intégrale de la musique de trémba, elle est capable de soigner le corps et l'âme, elle enchante l'homme et peut apprivoiser tout animal féroce. Cela ressemble aux soins que les certains guérisseurs populaires procurent avec de la mandragore.

Donnez nous un conseil comment progresser sur la route de la vie spirituelle et comment faire pour rencontrer un vrai maître ?

-Pour cela, il vous faut surtout de le vouloir très fort. Il s'agit d'une volonté puissante qui vient du fond de votre cœur et c'est elle qui vous guidera sur ce chemin. Il n'y qu'à cette condition que vous allez atteindre l'objectif déterminé, le but suprême. L'évolution spirituelle d'un homme dépend uniquement de sa personnalité. Si cette volonté qui vous anime est vraiment sincère, rien ne vous empêchera de réussir. L'homme durant le temps qui lui est prédestiné de demeurer dans ce monde, doit choisir de se tenir de la route d'une telle clarté limpide qui lui permettra de laisser les fruits de toute une vie de travail pour les générations nouvelles.

Comment communiquez-vous avec votre guide spirituel ?

-C'est un secret. Dans la magie, il y a beaucoup de secrets dont le magicien ne doit pas dévoiler à personne.

Quel est votre avis sur les superstitions ?

-Savez vous pourquoi le chiffre treize est considéré comme « la douzaine du Diable » (la traduction littérale) ou le portant du malheur. Le chiffre treize incarne Jésus Christ. Il avait douze élèves, comme il y a douze mois dans une année, et le sauveur du genre humain lui-même était le treizième. Pour celui qui est l'homme du cœur apportant de la bonté et de la joie de vivre aux autres, le chiffre treize est un chiffre porte-bonheur. Mais pour tous ceux qui sont pharisaïques, faux, amoureux de leurs propres personnes, le chiffre treize est un porte-malheur.
Encore par exemple, on dit que si le chat noir vous traverse la route, cette route est bannie pour vous (vous devez mettre la croix sur cette route, la traduction littérale), la chance ne vous sourira pas si vous ne changez pas votre destination. Qu'est-ce que cela veut dire ? Les gens lancent des pierres sur ce chat, le maudissent, mais en réalité, il faut le remercier, il vous sert de guide, de mise en garde, de signe vous prévenant que ce n'est pas votre jour de chance. Ce jour-là, il faut rester prudent, et ne pas prendre les décisions importantes.

Pour vous, la vie est elle remplie de signes ?

-Bien sûr que oui. Tout a son énergie résonante que j'entends que je sens. C'est de l'intuition qui est d'ailleurs propres à tous les humains mais dans les proportions différentes.

Est-ce que c'est possible de travailler son intuition ?

-Oui effectivement, c'est possible, mais il faut tenir compte qu'au départ les capacités de votre intuition sont prédéterminées par votre horoscope. Par exemple, les gens qui sont nés l'année du cochon, ont l'intuition très développée. Quand vous donnez à manger à la truie, pressée de l'impatience, elle peut même renverser l'auge avec de la nourriture. Mais quand vous devez l'égorger, vous n'arriverez pas à la faire avaler un seul morceau de son dernier festin, elle essayera de vous éviter par ce qu'elle pressent sa mort rapide.

Est-ce que vous pouvez remontez pour nous la voile qui couvre l'avenir de l'humanité ?

-Viendront les temps quand l'homme n'aura qu'une enveloppe extérieure et tous ses organes intérieurs seront artificiels et si puissants, qu'elles ne s'useront pas et l'homme atteindra son immortalité. Ce sera l'apogée de la science et de la civilisation. Les secrets enterrés avec l'Atlantide surgiront sur la surface. La pierre philosophale sera retrouvée de la sorte que tout métal sera apte à le faire transformer en or et les frais de cette production seront si peu élevés que personne ne portera plus les bijoux en or en marque de la richesse.
Quand nous, deviendrons immortels, nous deviendrons riches, comme le Seigneur notre Dieu. Nous serons plus proches de Dieu que ses serviteurs (probablement, il sous-entend les prêtres). Voilà comment cela doit se passer selon la loi de Dieu et selon les mécanismes du fonctionnement naturel.

Est-ce que vous sentez la présence des autres gardiens des traditions anciennes partout dans le monde comme par exemple, en Sibérie, ou en Amérique du Sud ?

-J'ai un lien spirituel avec eux. Ce sont des gens très rares, on les persécutaient et tuaient, voilà pourquoi souvent, ils exercent leurs activités occultes en cachette. Et bien sûr, je ne suis pas le seul à avoir le problème avec la transmission de mes connaissances. Les jeunes d'aujourd'hui sont devenus peu aptes au spirituel et ne cherchent pas à le comprendre.
Dans le cerveau de tous les êtres humains il y a une sorte de la « boite informatique », ces « boîtes », ces « récepteurs d'information » se diffèrent en volumes et en capacités réceptives selon les hommes. Par exemple, si trop d'information arrive au cerveau d'un homme avec un récepteur informattique de la petite puissance, il n'arrivera pas à la retenir, et en se forçant, il peut devenir schizophrène. Toute l'information quelle qu'elle soit doit être dosée selon les capacités réceptives d'un homme. Je suis quelqu'un sans éducation supérieure, mais il n'existe pas une telle question sur laquelle je n'ai pas de réponse. Beaucoup de secrets que les humains ne doivent pas connaître, je les connaît, et si ils sont fermés pour les autres ce n'est pas sans raison. Un homme simple n'a pas besoin de connaître les problèmes sur lesquels se penchent les scientifiques, ses soucis du quotidien sont souvent nutritifs : de quoi composer son repas, comment gagner son pain et pouvoir mettre de côté aussi. Et les gens qui font des recherches et étudier la nature, les traditions et les coutumes des peuples différents ne sont pas les patriotes de leur ventre. Ce sont des gens vrais qui ont trouvé la bonne voix. Cette année, une indienne exploratrice qui a fait le tour du monde, m'a rendue visite. Elle était avec un interprète qui me traduisait notre conversation en russe, et pour elle en anglais. Elle a réunit auprès de moi beaucoup d'information intéressante pour l'Inde, car les scientifiques ne se sont pas encore décidés est-ce que c'est les houtsouls qui ont emprunté les éléments de leur tradition orale en Inde ou c'est le contraire et ce sont les indiens qui ont fait l'emprunte culturelle en Houtsoulchina (territoire des Carpates ukrainiennes). C'est une histoire de connaissances anciennes et sacrées avec beaucoup de mystères à élucider. Parce qu'en Houtsoulchina, il y beaucoup de mots en commun avec les mots indiens.

Est-ce que c'est dans la capacité d'un être humain d'augmenter son volume réceptif d'information ?

-Non, c'est hors de la portée humaine car ce volume est démesuré par Dieu pour toute la vie, c'est le destin, et son déroulement est conditionné par les capacités cérébrales d'un homme, il n'est pas la question de faire plus ou moins de nos capacités.

Premièrement, qu'est-ce que vous regarder pour diagnostiquer un homme ?

-Les mots les plus sincères d'un homme ce sont ceux qui sont dit avec ses yeux. Dans vos yeux, je vois votre humeur vos faiblesses, et la puissance de votre force et de votre sagesse. Je le sens intuitivement, ce sont là les choses d'une telle finesse d'une telle délicatesse qu'elles n'étaient pas encore étudiées par la science.

Est-ce qu'un jour cela vous est déjà arrivé de faire recours à la médecine officielle?

-Je ne me rends jamais chez tous ces docteurs. Ce sont eux qui viennent chez moi avec leurs femmes et leurs enfants. Je ne tombe pas malade par ce que je ne suis pas patriote de mon ventre.

Les chamans du Mexique et ceux de la Sibérie utilisent les herbes hallucinogènes et narcotiques. Est-ce que dans la tradition houtsoulienne cela se pratique aussi ?

-Oui. Si je me trouve un élève ou une élève, l'heure de l'initiation, du baptême je l'aurais donné une sorte de narcotiques. Ou j'aurais fumée autour de lui de l'encens de sorte que la fumée hallucinogène enveloppe son corps où je l'aurais fais fumer lui-même une cigarette se composant de cette herbe, où je lui aurait préparé un breuvage à la base de cette plante pour le lui donner à boire afin de l'introduire dans l'état de transe. En étant dans la transe, l'homme voit l'autre monde et son guide spirituel. Procéder sans herbes hallucinogènes, aurait été mieux, mais les personnes qui peuvent entrer en transe sans en faire recours sont très rares. Tout de même, nous n'utilisons cette sorte de plantes que pour l'initiation et pour les rites à l'occasion des grandes fêtes

La fête la plus importante pour nous, les chamans, est la fête de Jean Baptiste (le titre orthodoxe original « Ivano Koupalo », cette fête chez les slaves est un mélange exemplaire entre la tradition païenne et chrétienne). C'est la naissance du monde pour l'année prochaine. Pendant cette fête, nous exerçons des rites bien spéciaux pour tous ceux qui sont avec la nature pour qu'ils se confirment, pour se solidifient en elle et pour leur procurer de la force. Alors notre mot devient puissant.

Est-ce que vous pressentez l'avenir de l'Ukraine ?

-Je ne me mêle pas de la politique.

Je ne vous parle pas de la politique mais de l'avenir pour notre terre ukrainienne. Qu'est-ce que vous pouvez nous en dire ?

-Nous portons le karma familial (voir national). Jusqu'à ce que nous ne rachèterons pas le mal, que nous avons causé (l'unité mythique des pères et des fils prend ici l'ampleur d'une unité nationale), il ne nous arrivera rien du bien, et rien ne se passera comme nous le souhaitons. Somme-nous si bêtes pour ne pas parvenir à construire un état heureux pour tous le monde ? Nous devons l'avoir et nous l'aurons un jour, mais aujourd'hui nous ne sommes pas en bonne période, les temps heureux sont à venir.

Qu'est que vous conseilleriez aux ukrainiens de manger ?

-Chez nous, beaucoup de produits sont empoisonnés, génétiquement parlant. Par exemple, le Coca-cola, que les enfants aiment autant, c'est du poison. Cela fait déjà dix ans que la Pologne ne consomme plus cette boisson. En Inde, on arrose des plantes avec ce liquide pour les protéger contre des insectes. C'est du poison de l'évolution civilisationnelle, il agit lentement, et non pas directement sur vous mais sur votre fruit. Tous les produits génétiquement modifiés, qui sont consommés par nos pauvres gens, les ruinent de l'intérieur en enlevant leurs forces naturelles que le Dieu a donné à chaque être humain. Tous ce qui a été élevé chez nous, (sans utilisation du compost artificiel mais naturel) est bon à consommer. Tout ce qui est artificiel est dangereux de manger, cela nous détruit, en tant que peuple.

Qu'est ce qui est plus important, la terre sur laquelle vous êtes né ou la terre sur laquelle vous avez construit votre vie?

-Là où nous vivons, nous nous adaptons, là où nous sommes nés, c'est du vrai, c'est de l'essentiel. Par exemple, si vous êtes né en Sibérie, c'est là-bas qui est votre patrie, si la terre de votre naissance fait partie de l'Ukraine, votre patrie est l'Ukraine. Le lieu de notre naissance est notre source, notre matrice vital.

Qu'est-ce que l'homme doit craindre le plus ?

-Il n'y a rien de plus horrible dans ce monde que la vieillesse et la jalousie. Les jeunes gens ont du mal à le comprendre, mais quand ce sera leur tour de devenir grand-père qui se fait caca dessus qui pète et qui pleurniche, ils le comprendront. Mais plus horrible que la vieillesse est la jalousie. A cause d'elle les frères s'entretuent. La concurrence sans pitié règne. Un médecin n'aime pas l'autre médecin plus compétant plus fort que lui, le musicien n'aime pas l'autre musicien plus doué que lui, le prêtre n'aime pas l'autre prêtre qui a une paroisse plus grande que lui. Cette jalousie-là est comme la rouille sur le fer. Le fer peut être très solide, mais si la rouille s'y installe on peut le casser avec les mains nues.

Mais ce qui concerne de la vieillesse ne peut-elle être différente, comme par exemple, l'est la votre, remplie de la sagesse ?

- La vieillesse dépend du savoir-vivre d'un homme et de son histoire personnelle.

Beaucoup de gens aujourd'hui essayent d'améliorer leur santé en s'abstenant de manger...

-La faim peut aider aussi, c'est une épreuve plutôt spirituelle que physique. Il faut jeûner progressivement : la première semaine- pas plus qu'une seule journée de faim, dans deux semaines- deux jours de faim, dans trois ou quatre semaines- trois jours de faim et ainsi de suite pour arriver de cette manière à sept jours de faim. Dans un an, vous pouvez jeûner deux semaines de suite, dans deux ans- trois semaines. Il faut que votre organisme s'habitue à cet exercice. L'organisme humain possède en lui une sorte de réservoirs intérieurs, qui le fournit en énergie pendant quelque temps sans nourriture. Mais quand sur la langue apparaissent les taches jaunes, c'est le signal d'alerte que ces réservoirs d'intérieur sont vides. Alors, il faut commencer à se nourrir, mais doucement commençant par les petites rations en les augmentant petit à petit, si non vous allez ruiner votre santé.

J'ai entendu dire que vous avez des fines connaissances en sexologie...

-Pour moi, il n'y a rien de plus sacré que le feu et l'eau. L'eau apporte de l'information sur un être humain et sur le monde, le feu purifie de tout mal. Je vénère le feu, le soleil, la lune, les étoiles, l'air, la terre, l'eau, et toutes les forces naturelles, qui m'aident pour les occasions différentes. Nous sommes la nature, la nature est nous. Elle est si douce avec comme une mère avec son propre enfant mais si on lui fait du tort, elle devient plus terrifiante que le juge le plus sévère. Regardez par exemple, si depuis long temps vous ne vivez pas avec quelqu'un du sexe opposé, votre noyau se remplit de liquide (de sperme). Si elle ne sort pas, la première fois vous vous couvrez de poils comme un porc-épic, votre système hormonal se déstabilise. Deuxième fois votre orientation sexuelle change. Troisième fois, commencent la schizophrénie, et le retard mental, la peur de gens, les accusations insensées vers les membres de la familles, d'une communauté. Etape par étape, l'homme devient infirme. La schizophrénie ne se guérit ni dans les hôpitaux et ni dans les cliniques. Ce qui arrive quand on va cotre la nature contre ses lois. Dans les certains cas la nature apporte le secours à l'être humain, voilà pourquoi, dans les prisons et dans les monastères, et même en dehors de ces édifices, partout dans le monde il existe les relations sexuelles entre deux personnes du même sexe, les femmes dans ce cas devient lesbiens, les hommes homosexuels. C'est normal, c'est bien car, c'est le don de la mère Nature donné afin de prévenir l'infirmité de ces gens. Parce que si l'énergie sexuelle ne se consomme pas comme il se doit, elle frappe dans le cerveau. On regarde avec le dégoût sur tous ces gens- là, mais c'est la nature qui les sauve ainsi, et merci Dieu, merci la Nature. Selon la nature dans ces relations, il n'y a rien de mal. J'étudiais profondément, les côtés différents de la vie intime de gens, en tant que psychologue, entant que sexologue et en tant que philosophe.

Notre chanteuse populaire Rouslana était diffusée sur l'eurovision avec nos danses houtsouls, « les danses sauvages », et elle a su toucher le grand public international. Maintenant certains de nos compatriotes la maudissent, en l'accusant de donner une image honteuse de notre Houtsoulchina, il disent : « Est-ce que nous sommes des sauvages, pour nous montrer ainsi ? ». A cela je leur répond : « Soyez en heureux, car tout ce qui est sauvage, provient de la nature, et tout ce qui est civilisé, est artificiel ».

Qu'est-ce que vous pensez de la polygamie masculine ?

Le sage Salomon avait trois cents femmes et sept cents maîtresses de toutes les confessions religieuses. Vous n'êtes vous jamais posés la question pourquoi en avait il autant ? Cet homme était loin d'être le taureau de kolkhoze.
Salomon était le plus sages des tous les sages pour son époque. Sa sagesse procurait de l'énergie vitale sur toutes ces jeunes femmes qu'il possédait. Les contes philosophiques de Salomon font partie de la Bible. Vous voyez, il avait beaucoup de femmes, et il est devenu saint. Alors, soyez et vous aussi saints.
Je suis souvent plus d'accord avec la religion musulmane qu'avec la religion chrétienne. Dans la foi chrétienne tous ces péchés sont condamnés et punies avec une sévérité exagérée tandis que dans la foi musulmane ces péchés-là sont tolérés beaucoup plus. Aussi un musulman peut avoir une femme officielle et un tel nombre de favorites qu'il pourra entretenir. Le plus important que la femme principale qui commande sur les autres, l'accepte sans colère et sans jalousie, parce que c'est la loi de Dieu, ce ainsi qui est écrit dans le Coran. C'est une ressource vivifiante pour la santé d'un homme pour la longue vie, pour la beauté et la sagesse. Et quand vous vous séchez dans le célibat, ne sachant comment vous approcher de celle que vous désirez, vous vous condamnez à la souffrance.

Mais chez nous, si dans le couple marié il y a de l'infidélité, cela fait souffrir.

-C'est à cause de notre loi chrétienne, mais si nous étions sous la loi musulmane, il n'y aurait pas de souffrance. Car dans votre tête aurait été profondément encré que c'est la norme.

Alors, la femme a-t-elle aussi le droit d'avoir tant de partenaires qu'elle veut ?

-Il ne faut jamais croire une femme. Il ne faut jamais dire la vérité à une femme, ne faites pas de l'amitié avec la milice (la police), et vous passerez votre vie sans soucis.

Est- ce que vous n'avez pas marre de voir tout ce monde avec leurs problèmes ?

-Non, je n'en ai pas marre, et cela ne m'ennuiera jamais, parce que j'aime les gens. J'aime tout le monde et les assassins, et les ennemis, et les envieux, et les aventuristes. Ils sont tous des humains qui se sont trompés sur la route de la vie. Mais quand viendra l'heure de les corriger ils comprendront leurs fautes. Nous sommes tous l'œuvre de Seigneur Dieu, tous nous avons une âme, un cœur, et de l'amour même un peu. Nous n'avons pas le droit de juger l'âme d'un être humain, c'est le Dieu qui jugera non pas nous. Il faut aimer tout le monde comme on aime soi-même. Et il ne faut pas prendre en compte ni la confession religieuse ni la nationalité des gens. Tous les gens sont égaux devant le Dieu, de la même façon comme pour une mère ses propres enfants. Viendra une epoque quand il n'y aura qu'une seule langue commune pour tous. Cela s'est déjà produit auparavant, et cela s'est reproduira car la roue de l'histoire tourne et tout se répète, mais nous ne l'apercevons pas.
Je suis un homme simple, je suis mortel comme tous le monde. Même l'enfant de bas âge peut venir vers moi pour communiquer. Je n'ai pas de l'orgueil, je ne me porte pas au piédestal. Chacun mérite que j'écoute ce qu'il a à me dire ; et le misérable, et l'intelligent et l'attardé mental, et le sage et le moqueur. Ce n'est pas important comment il est celui qui j'accueille chez moi, je l'accueille comme la terre l'accueille.
Et mes pouvoirs spirituels et physiques, ne sont que les attributs de ma personnalité, et j'ai une grande responsabilité à tenir devant Dieu pour ce don. Chacun a un don de Dieu mais pour le reconnaître cela ne pas donné à tout le monde.

En quoi vous trouver de la satisfaction, en plus du café ?

- Je suis heureux quand je parviens à aider à un être humain, quand je lui donne une partie de moi. C'est en cela, est ma joie ma consolation. Je n'éprouve pas de la jalousie envers les personnes qui ont les mêmes pouvoirs que moi. Parce que c'est un travail très dur et délicat. La vocation d'un molphar est une lourde croix, qu'il porte toute sa vie. C'est une énorme responsabilité pour chaque mot, qui tombe de sa bouche et même s'il ne fait qu'effleurer son esprit. Parce que le mot est une arme la plus puissante dans l'univers. (encore une fois voir Dumézil Esquisses de la mythologie Vac et Apollon).

Qu'est-ce que vous voulez souhaiter aux gens ?

D'avoir le cœur honnête, d'être compatissant, vivre selon les lois de Dieu ne pas être égoïste. Plus vous donnez, plus vous recevez. A propos, il existe un proverbe : « Celui qui donne aux autres, donne à soi-même ».

L'interview était pris et enregistré par Iakovlev Iaroslav.

L'original de cet interview avec les photos était publié, dans le magasine « La roue de la vie », le numéro 5 (en mois de février) sous le titre « La sagesse d'un vieux molphar ».

Première partie

Les molphars et les mazzeri « cousins » éloignés

Chapitre 1

Le mazzeru et le molphar comme phénomènes dérivés du chamanisme.

Nous allons commencer notre étude comparative par un essai de définition du « mazzeru ». Qu’en est-il au juste de ce personnage mystérieux de la tradition orale corse? Un chasseur d’âmes ? Un meurtrier involontaire ? Un messager de la mort ? Un chaman ? Une résurgence d’une très ancienne tradition ? Ne soyons pas trop hâtif avec ces conclusions trop généralisantes. Tout n’est pas si simple comme cela peut apparaître au premier regard.

Le «mazzeru » est un homme ou une femme (la mazzera) qui a le don des rêves prémonitoires de la mort. Dans les plupart des cas, ces songes ont la forme de chasse. Le rêveur, en l’occurrence le mazzeru, se voit à l’affût d’un animal domestique ou sauvage. Le moment de l’abattre est le moment fatidique où se reconnaît la personne incarnée dans l’apparence animalière. Ainsi est-elle condamnée à mourir dans un délai proche variant de trois jours à un an mais toujours tombant sur un nombre impair de jours. Selon Roccu Multedo, il existe deux manières d’identification de la victime : par le regard, comme pendant un flash back ou par l’ouïe. Soit c’est le museau de la bête qui devient le visage de la connaissance du « chasseur »[1]onirique, soit c’est le cri ou le soupir de la proie blessée qui correspondent à la voix de son double humain.

Mais l’importance de cette révélation auditive ou visuelle est dans le fait qu’a su bien souligner la jeune et prometteuse chercheuse corse Vannina Lari : le mazzeru ne réalise vraiment se qui s’est passé dans son songe qu’une fois réveillé. Autrement dit, le mazzeru en tant que tel n’agit que dans ses rêves, tandis que leurs interprétions appartient au monde réel des vivants. Ainsi, nous pouvons relever les trois notions fondamentales du phénomène mazzerique : le monde des rêves en relation avec la mort, le double et la chasse sous tous ses aspects (le rapport de l’homme à l’animal, de l’animal à l’homme). Surtout, les deux premières de ces notions ont souvent servi comme des points d’appui pour faire le lien entre le mazzeru corse et les chamans des traditions différentes, mais la piste de molphars carpatiques n’était jamais encore exploitée dans cette direction.

Au début de XX° siècle, dans son roman Les chevaux de feu (le titre original les ombres des ancêtres oubliés) qui a servi de base pour le film de Paradjanov, Mykhaïlo Kotsioubynsky donne la définition assez exacte du molphar, bien qu’il s’agisse d’un personnage de la fiction littéraire : « A son sujet, les gens disaient qu’il était omniscient et tout puissant ; il commandait la grêle et était sorcier (dans la version originale : « molphar », le terme « sorcier » n’y serait pas tout à fait exact, selon les croyances goutsouliennes : le sorcier est inférieur au molphar, l’un n’agit que dans ses propres intérêts, tandis que l’autre assure une fonction sociale au sein de sa communauté[2]). Dans ses mains vigoureuses il détenait les forces célestes et terrestres, la mort et la vie, la santé des bêtes et des hommes, on le redoutait, mais on avait besoin de lui. »[3] Nous y retrouvons tout ce qui représente les molphars dans l’imaginaire populaires : les détenteurs des connaissances secrètes, celle de la magie comprise, les régulateurs du temps et les médecin-mans. En de mêmes termes nous aurions pu qualifier les chamans, il ne manquerait que leur faculté d’entrer en transe qui est comparable avec les rêves mazzeriques. Pourtant si l’écrivain ukrainien ne mentionne pas cette faculté, ce n’est pas une raison pour en conclure que ces « chamans » goutsouliens en sont dénués. Encore une fois les interviews avec le molphar Mékhailo Néchaiy nous serons d’un grand secours : parce qu’il nous explique que la transe pour lui comme pour tous ses « collègues » est une nécessité « professionnelle ».

La transe chamanique ou l’art d’extase.

Dans le livre de Jérôme Pietri et Jean-Victor Angelini Le chamanisme en Corse, nous trouvons l’explication suivante du chamanisme : « Le chamanisme est …largement fondé sur la capacité de circuler dans les plans surnaturels et d’entrer en contact avec le surhumain. En état de transe le chaman fait preuve d’incontestables dons de clairvoyance et de télépathie et guérit les malades ». Chez Roccu Multedo le chaman est présenté comme un technicien de l’extase[4] et le mazzeru comme celui qui partage cette technique : « Le culpadore (un des noms de mazzeri qui varient selon des régions) la pratique (la technique de l’extase). Celui de Figari compare le besoin de culpa (« mazzeriser ») à une batterie qui a besoin de se décharger pour se régénérer ensuite. « I culpadori, dit-il, colpani par eddi stessi » ( les « tueurs en esprit » chassent » pour leur besoin personnel) ; s’ils ne le font pas, ils se sentent mal. Cet état est confirmé par Mario Mercier quant au chaman Eskimo « qui, à l’exemple de chaman Sibérien, entreprend des « voyages » pour son plaisir ou pour se recharger en énergie » »[5].

En ce qui concerne les molphars leur représentant le plus âgé « officiel » Mékhailo Néchaiy avoue la chose suivante : « Une fois dans l’année j’entre dans une grotte pour les douze jours successifs, je me plie de la sorte que ma position imite celle de l’enfant dans le ventre maternel, je perds tout le contact avec la réalité, je débranche ma mémoire, ma respiration et je reste ainsi sans bouger sans manger et boire. Si quelqu’un avait décidé de vérifier mon pouls, il aurait pensé que je suis mort. Pour pouvoir le faire, j’ai dû m’entraîner durant des années. Pourquoi faut-il que je le fasse ? Parce que tout au long de l’année, les gens viennent me voir avec l’énergie négative de leurs malheurs. J’absorbe toutes ces ondes noires. Et pour m’en débarrasser, pour me purifier je m’enterre dans une grotte. Si quelqu’un sans entraînement avait voulu de me suivre, il n’en serait pas sortit vivant »[6].

A partir de ces exemples, il paraît que le pouvoir extatique est déterminant pour les mazzeri et les molphars tout comme pour les chamans: sans lui, ils ne peuvent pas fonctionner, c’est leur moteur vital. En fait la transe ou l’extase c’est aussi et surtout la technique pour établir un lien entre les mondes invisibles et le nôtre[7]. Et toutes les fonctions molphariques et mazzeriques se basent sur ce lien.

« Pour le mazzeru –écrit Roccu Multedo- être ravi en extase c’est, dans son sommeil cataleptique, se matérialiser en animal ou dans sa chasse nocturne faire corps à la fois avec le fusil et avec le gibier. »[8]

Tandis que le molphar, pendant sa transe, communique avec les esprits. Voilà ce que dit à ce propos Mékhailo Néchaiy dans son autre interview : « A ce moment, je passe dans une autre dimension et je communique avec un esprit qui me donne les directives à suivre. Je crois que cette créature avec laquelle j’ai un lien spirituel, est le martyre Ponteleimon, il était guérisseur, reconnu par l’église orthodoxe comme un saint ». Dans deux cas, il s’agit de recevoir un message de l’autre monde, à part que les rêves de mazzeri ont les conséquences directes dans le monde des vivants, en l’occurrence la mort, tandis que la transe molpharique n’est pas forcement un présage : cette communication avec le monde parallèle n’est pas toujours destinée à être révélée à quiconque, et souvent ne concerne que la personne du molphar qui est en fait guidé par l’au-delà. Mais la différence la plus flagrante entre l’extase mazzerique et celle de molphar, c’est le fait que les voyages onirique du mazzeru s’effectuent malgré lui : il ne fait rien pour les déclencher au moins volontairement (Roccu Multedo propose l’hypothèse de la consommation par les bergers corses du miel à l’aconit qui aurait pu entraîner « le comportement mazzerique »[9]). Quant au molphar pour atteindre l’état de transe, il doit maître en œuvre tout un rituel chamanique qui consiste soit à retenir la respiration et ses organes vitaux comme le savent faire les adeptes de yoga, soit c’est la musique de la guimbarde qui l’emporte dans l’autre monde (dont nous parlerons plus tard), soit son état second est le fruit de la consommation d’une plante hallucinogène comme par exemple Datura stramonium ou Cannabis sativa. Bien sûr, il n’y que les plus forts qui puissent effectuer cet exercice mental sans avoir recours aux drogues[10], le chamanisme mondial en connaît l’usage assez répandu. Ensuite les limites spatiotemporelles ne sont pas les mêmes chez les mazzeri et les molphars. Les rêves mazzeriques se produisent soit la nuit soit « à l’heure ténébreuse de midi » on les appellera, alors les cherzelli[11], leurs durées ne se distinguent pas trop de celles des rêves « ordinaires ». Le molphar réalise cette purification de son esprit, une fois par an pendant 12 jours commençant par le vendredi « noir » celui qui précède la Paque orthodoxe[12]. Il pratique dans l’année d’autres transes d’une courte durée mais leur portée est moindre et surtout il ne s’agit pas, alors, de se ressourcer en énergie mais seulement d’obtenir quelques informations.[13] Ensuite, pour « mazzeriser » le corps de mazzeru n’est pas obligé de quitter son lit contrairement au molphar pour lequel la grotte symbolise l’entrée dans le monde souterrain, celui de l’enfer, des morts[14]. Pourtant pour ses courtes transes le molphar tout comme les mazzeri n’est pas obligé de partir de chez lui. Malgré toutes ces différences entre l’expérience des rêves mazzeriques et celle de la transe molpharique, toutes les deux sont des mécanismes permettant de « côtoyer » la mort pour ensuite la nier : rien que le fait de pouvoir établir la communication entre deux mondes celui des morts et celui des vivants sert de preuve pour cette conception religieuse qui affirme que la mort est une autre vie. Les rêves mazzeriques et les transes molphariques sont de type cataleptique (Mario Mercier) ce qui signifie qu’elles engendrent un état physique qui est proche de celui d’un mort[15] . Ce qui nous permet de conclure qu’il s’agit de la double négation : celle de la mort par la mort.[16] Quoi qu’il arrive, les rêves du mazzeru et les transes du molphar peuvent être appelés le dédoublement : c’est leur double qui entre en contact avec ce qu’on appelle « le surnaturel ».[17]

La notion du double

Le rêve impose la notion du double qui figure d’ailleurs dans certaines définitions de ce phénomène de la tradition orale corse, comme par exemple celle-ci : « Les « mazzeri » : ce sont des êtres humains en relation avec l’autre monde. Ils tuent en rêve le double de la personne qui doit mourir et l’aident à franchir les Limites. » [18] En fait, le thème du double peut être élaboré, ici à trois niveaux, le double de mazzeri qui chasse et qui tue le double de la victime « choisi préalablement par le destin », dans le monde onirique qui est le double du monde réel. Les doubles du rêveur et du rêvé sont leurs esprits qui ont quitté leurs corps physiques pour leur voyage astral car selon les croyances populaires corses, l’être humain se compose de trois éléments distincts[19] : le corps physique u corpu à sali qui est mortel, l’âme immortelle l’anima celle qui quitte le corps, son habitat terrestre, à la mort de la personne pour aller vers la vie éternelle dans l’au-delà et entre les deux s’impose l’esprit u corpu à spiritu (le corps astral) , c’est une notion frontière, l’esprit peut garder l’apparence physique du corps ou en prendre une autre, on le décrit souvent comme transparent et impalpable. Selon Roccu Multedo : « Tout le mal viendrait de ce que ce corps astral s’évade pendant la nuit et c’est pourquoi il ne faut pas réveiller une personne ou un mazzeru trop brusquement. Son corps astral pourrait ne plus réintégrer son corps physique, ce qui provoquerait une sorte de crise cardiaque et la mort s’en suivrait »[20]. Vannina Lari rejoint Roccu Multedo sur cette confirmation en l’enrichissant par l’explication du «sort» de la victime du rêve mazzerique : « Le mazzeru est un être psychopompe, son rôle est de guider l’esprit vers le monde des morts afin de permettre ce franchissement vers l’autre côté. Le corps sans âme ne peut plus vivre, le passage définitif provoque la mort du corps physique ».[21] Il nous reste juste à préciser que si le mazzeru «le personnage principal» de son rêve de cette action dans le monde parallèle prend conscience de ce qui s’est passé la nuit, à son réveil, «le personnage secondaire », celui au rôle passif n’en a cure, et c’est au « chasseur onirique » de l’en informer déjà dans le monde vivant.

Quant au molphar c’est aussi son double, son esprit, qui quitte son corps physique pendant sa transe et la conception sur les trois « corps » de l’être humain y est tout à fait applicable. Tout comme le mazzeru, il est dangereux de le déranger pendant son voyage astral, il peut ne pas en revenir. C’est justement pour cette raison que le choix de la grotte est très important : elle doit se situer dans un endroit que seul, le molphar connaît, cette « conspiration » lui évite tout le dérangement, et lui facilite la coupure avec la réalité de ce monde. Mékhailo Néchaiy ne révèle pas ce qui se passe exactement pendant qu’il communique avec son esprit guide, il dit que cela lui est interdit, c’est un secret qu’il partage avec ses ancêtres-molphars. Mais nous pouvons en conclure, reprenant la chercheuse ukrainienne Gromitsa Berdnik, qu’apparemment pendant sa transe, contrairement à la majorité des expériences chamaniques de ce genre, le molphar y joue un rôle, plutôt passif, même si théoriquement, il aurait pu y affronter les obstacles divers comme, par exemple, combattre les esprit hostiles. Le molphar dans son état second est en quelque sorte en «stage de formation» qu’il répète une fois par an dans la période propice pour établir le contact avec l’esprit de son «moniteur» du monde des morts, et c’est ce dernier qui joue le rôle actif. Avant tout, ce n’est pas le molphar qui choisit son guide mais l’inverse, et c’est l’esprit qui agit sur le molphar et non pas le contraire, en lui transmettant l’information qu’il tient de «la plus haute substance » de ce que nous pourrions appeler Dieu. Par contre à sa sortie de l’extase, le molphar devient le maître du message reçu, c’est son pouvoir, et c’est lui qui choisit comment s’en servir dans la vie réelle. Ainsi la situation de la transe chamanique est l’inverse de celle du rêve mazzerique même si tous deux sont des êtres psychopompes. Mazzeru actif dans son rêve, à juste titre, il est ici le sacrificateur tandis que le molphar ne l’est pas. Cette chasse onirique tout en lui procurant l’état de l’extase ne le rend pas responsable de la mort qui va toucher sa proie dans le monde réel car avant d’accomplir sa tâche, il ignore son identité, c’est le Destin, le qual-cosa[22]…corse qui guide sa main. En effet, le rôle d’un mazzeru ou d’une mazzera ne consiste pas à tuer mais à accompagner l’âme dans l’autre monde [23] comme celui de Charon dans la mythologie grecque. Mais il est aussi proche du chasseur sauvage Odin, de la mythologie scandinave par sa thématique de la chasse et du double animalier. Quant aux molphars ils connaissent aussi la transformation de l’esprit en animal dans leurs pratiques occultes.

L’animal comme le double.

Quant on parle des mazzeri et de leurs rêves mazzeriques, nous ne pouvons pas passer outre leurs rapports d’ordre spirituel avec les Animaux [24] : « Si l’esprit peut garder la même forme que le corps physique, il peut également prendre corps dans celui d’un chien, chat, sanglier »[25]. Comme nous l’avons déjà dit « le scénario onirique » se déroule généralement de sorte que l’esprit du mazzeru chasseur garde son apparence physique habituel tandis que l’esprit de la victime se présente dans le corps d’un animal. Ce qui fait justement du mazzeru le sacrificateur et de sa victime le sacrifié ou la sacrifiée. Nous avons envie de citer ici la conclusion si juste de Vannina Lari : « Cela signifie qu’à chaque monde correspond un corps, une apparence donnée par une matérialisation d’un esprit dans un corps plus adapté à l’espace visité ».

Et bien que Dorothy Carrington affirme que les mazzeri ne sont pas considérés comme susceptibles de prendre l’apparence d’animaux, elle admet tout de même leur transformation possible, lors de leurs rêves, en chien et « en animaux qui en général chassent, mais ne sont pas chassés »[26]. Le chien, comme nous le savons, est le premier compagnon de l’homme surtout d’un chasseur, c’est son lien avec le monde animalier. C’est aussi un animal psychopompe, il suffit de penser au Cerbère de la mythologie grecque, ce chien monstrueux à trois têtes (50 suivant Hésiode, 100 chez Horace), d'un aspect colossal, avec le cou hérissé de serpents, qui était le gardien de l’entrée des enfers, posté près du Styx, ou à son équivalent égyptien Anubis au corps d’homme à tête du chacal (ou chien sauvage), dans les textes des pyramides, il est le guide qui conduit le défunt à travers le royaume des morts jusqu'à la salle des deux Maât, le présente au tribunal divin et veille au bon déroulement de la pesée du cœur (la psychostasie).

Dans son analyse de la relation des mazzeri avec les chiens, la chercheuse anglaise insiste sur son caractère ambiguë : « Tandis que certaines personnes m’ont assuré que les mazzeri tuent les chiens tout autant que les autres animaux, les chiens sont évidement leurs alliés lors de battues de sanglier. De plus, on croit que les mazzeri de Chera, où ils sont connus sous le nom de colpadori, se transforme en chien pour chasser les animaux en meutes et les déchire de leurs dents. A Levie, dans l’Alta Rocca, les mazzeri connus sous le nom de mazzatori prennent l’apparence de chiens, m’a-t-on dit, et sautent parfois sur la croupe des chevaux (un autre animal psychopompe) ou des mulets derrière les cavaliers. On ne pense pas, cependant, qu’ils chassent quand ils se sont ainsi transformés. Par contre, dans un gros village de la vallée de la Spelunca, on croit que les mazzeri se transforment en chiens pour servir de rabatteurs dans la chasse aux porcs qui errent dans les rues. »[27]

Les molphars, eux, peuvent se transformer en animaux selon leurs besoins mais le plus souvent ils s’incarnent dans le loup, ce cousin sauvage du chien, qui joue le rôle de leur double spirituel[28]. Là dessus, ils sont plus proches que « les mazzeri en chiens », des loups-garous de la tradition française. Nous trouvons les témoignages des ces transformations miraculeuses dans les anciennes chroniques de la Russie kiévienne et dans les anciennes légendes consacrées aux « volhvé-hmarogonételi » (le flamine – chasseur des orages) , le premier mot «volhv », désignant le flamine, le sage, l’équivalent du druide, se rapproche du mot « volk » (russe) ou « vovk » (ukrainien) signifiant loup, et, suivant cette logique, nous avons « le loup qui chasse les orages ». En effet, ces sages probablement les molphars du Moyen âge, avaient la réputation de se transformer en loups. Mais vu que c’était déjà l’époque du christianisme on les considérait comme les alliés du diable[29]. Autrement, dans la symbolique païenne le loup correspond au courage et à la force militaire, le loup Fenrir de la mythologie germanique en est un exemple parfait : il incarne par excellence la puissance guerrière. De la même façon, chez les ukrainiens, les cosaques dont la combativité est devenue légendaire avaient la réputation de pouvoir prendre l’apparence de loups. La meilleure illustration d’une telle mystification populaire, autour d’une personne historique, est la légende du Cosaque Ivan Sirko, excellent chef militaire et guerrier : « On racontait de lui qu’il était né avec des dents énormes et qu’il savait se transformer en loup. Les anciens sages ont prononcé sur lui des incantations, de sorte qu’il est devenu invulnérable : rien ne pouvait l’atteindre ni le feu, ni l’eau, ni le plomb, ni le fer »[30]. Le double canidé de Sirko rassurait ses compatriotes et faisait peur à ses ennemis. Son invincibilité est à rapprocher à celle des mazzeri qui selon la légende sont immortels et ne peuvent mourir que lors de leurs combats annuels dont nous parlerons plus tard. Cet «ottoman» (chef des cosaques) a vécu jusqu’à l’âge de 70 ans et est mort d’une mort naturelle, ce qui est une chose extrêmement rare pour un guerrier actif. Sa longue vie, et son nom Sirco (le gris donc le loup) inspiraient l’imagination populaire de sorte que la légende du cosaque-loup a perduré jusqu’à notre époque. Dans un des interviews, Mékhailo Néchaiy dit que les cosaques avaient des capacités molphariques et cite ses ancêtres parmi eux[31]. La transformation du molphar est volontaire : soit il se transforme lui-même pour ses propres besoins ou de ceux de sa communauté soit il peut transformer quelqu’un d’autre. Dans les légendes carpatiques le thème du loup–garou est très fréquent[32]. On y raconte que la capacité de s’incarner dans un corps d’animal peut être héréditaire ou acquise mais dans tous les cas, on peut reconnaître celui qui a ce don par la tonitruance de sa voix ou par l’absence totale de poils sur son corps. Pour se défendre contre une telle créature, il faut se servir d’une hache avec laquelle était tué un serpent[33].

Quant aux molphars, ils connaissent quelques unes des pratiques occultes de ces transformations que nous trouvons chez Gromovitsa Berdnik : « l’intégration du corps d’un loup peut se réaliser de façons suivantes : en jetant douze couteaux, par-dessus un seau à eau, qui doivent être dirigés vers la terre. Autrement ce manœuvre se fait du dos en direction du soleil. Une personne non initiée pouvait se transformer en loup si par hasard, elle avait marché sur un objet ensorcelé (nous pensons ici à la capacité de transmettre son don de voyance par le pied qui est connu en Corse). Mais les molphars les plus puissants gardent le secret d’un moyen plus fort et plus sûr pour pouvoir prendre l’apparence d’un loup, c’est la parole d’une mère »[34]

Roccu Multedo et Dorothy Carrington signalent l’incontestabilité de « la métamorphose d’un mazzeru en taureau blanc »[35] un autre animal psychopompe. En ce qui concerne les molphars, même s’ils peuvent s’incarner en taureau blanc ou noir, pour eux , cet animal représente, avant tout, le symbole de la virilité masculine, des forces protectrices terrestres (par leurs sabots), et aussi, les puissances créatrices de l’univers[36] (ce qui est à interpréter par l’aspect céleste et lunaire du taureau par ses cornes : et la lune à son tour symbolise la lumière et le cycle du temps sur terre, ces deux éléments primordiaux des mythes cosmogoniques[37]). Quoi qu’il en soit, la transformation molpharique est à rapprocher de ce que Miss Kinsley a baptisé « l’âme de la brousse » et ce que Eliade appelle « l’âme sous une forme animale » en parlant des sorciers africains.[38] Et nous pouvons reprendre ici la conclusion de Mme Carrington qui souligne que « les relations entre les africains et leurs âmes de la brousse se passent dans la vie réelle sur le plan ordinaire de la conscience, (nous pouvons dire la même chose des molphars carpatiques), tandis qu’en Corse elles n’existent qu’en rêve, les rêves des mazzeri ». Tout de même, il nous semble important d’y ajouter le fait que les mazzeri et les molphars, en rêve ou pas, lors de leurs transformation préfèrent des animaux qui évoquent par leur aspect physique la force guerrière, or les fonctions molphariques et mazzeriques se construisent sur cette force.

Chapitre 2

Les rôles et les actions.

Les régulateurs

« Le mazzeru serait un régulateur des mortalités d’un village, parce qu’il protège ce village comme les benandenti du Tyrol qui, il y a trois siècles, protégeaient les récoltes, les moissons et les vendanges »[39] a écrit Roccu Multedo. Les molphars, comme les benandenti, ont cette fonction de protéger les récoltes. Donc les mazzeri et les molphars jouent avant tout un rôle social de protecteurs de leur communauté. Dans certains cas, il s’agit de combattre : les mazzeri d’un village s’affrontent avec les mazzeri du village voisin, tandis que le molphar, comme régulateur du temps, influe sur les puissances célestes comme un vrai guerrier. Les noms qu’on emploie pour désigner le phénomène chamanique corse, et le phénomène chamanique ukrainien sont explicites de leurs « missions ».

En corse, vu la richesse polyphonique de cette langue, le même signifié peut avoir plusieurs signifiants qui changent selon les régions, le phénomène mazzerique n’échappe pas à cette règle. Le mot « mazzeru » qu’on utilise généralement dans les ouvrages à portée scientifique proviendrait de mazza : « massue ou maillet, outil de bois qui rappelle l’ancienne pratique consistant à assommer le moribond afin de l’aider à franchir lorsque l’âme passée, le corps tarde à s’éteindre. Ammazzà, tuer, reprend également cette idée d’assommoir. Le ou la mazzeru(a) -puisqu’il n’y a pas d’exclusivité masculine ou féminine- est le porteur de massue, celui qui a le pouvoir d’amener ou pas une âme dans l’autre Monde »[40]. Donc ce nom est indicateur de la fonction du sacrificateur du mazzeru : la massue étant une arme utilisée aux fins sacrificielles.

Tandis que, l’autre terme « lanceru » désignant « …cet initié lié à la mort nous amène vers l’idée de guerriers puisqu’il s’agit de lanceru, lancier, porteur d’une lance, armé pour défendre, le rôle d’une arme est toujours double, c’est pour cela que l’expression chasseur d’âmes (D. Carrrington) reste réductrice… » Là-dessus nous sommes en parfait accord avec Vannina Lari l’auteur de cette citation. Nous allons nous arrêter sur cette explication des appellations du mazzeru car le « lanceru » exprime le mieux l’idée du combat et de la fonction sociale des mazzeri où, devrons-nous dire ici, des « lanceri ». Ses autres noms comme nous le signale la même chercheuse corse reste : « à la même thématique –réductrice- de l’assassinat, les termes de culpadori et acciaccadori participent également à la réputation d’implacabilité de cette personne »[41].

Les molphars eux, n’ont que trois variantes « officielles» de leurs « titres professionnels ». Le premier que nous employons ici à l’exemple de Kotsoubynsky, de Paradjanov et de Gromovitsa Berdnik connote de la magie cette notion qui est quasiment absente chez les mazzeri, étant donné que la molpha est un ancien mot désignant l’objet enchanté : « N’importe quel objet peut devenir molpha, -comme l’amulette qu’un molphar a fabriquée exprès pour cela, comme, également une pièce de vaisselle qu’on utilise dans la vie de tous les jours, ou un vêtement, même un outil pour labourer la terre ou carrément une arme. Le caractère de la molpha se détermine par rapport à la situation pour laquelle elle se destine. Sur l’objet choisi, le molphar récite des incantations ou des imprécations parce qu’une molpha peut être faite pour le bien mais aussi pour le mal. L’amulette –molpha, celle qui protège son possesseur, doit contenir un dessin approprié, comme par exemple le soleil avec le visage souriant humain… Le soleil étant le symbole païen suprême est la protection contre des mauvais esprits. Sur le côté verso doit être gravé avec les lettres codées la prière –incantation »[42].

Les deuxième et troisième variantes de leurs noms sont : gromivnék (du mot russe « grom » l’orage), et gradivnék (du mot « grad »–grêle). Ils nous renvoient directement à la fonction sociale du molphar comme celui qui peut maîtriser les orages et tout ce qui s’y rapporte.

Les combats

Dans l’ouvrage de Dorothy Carrington, Mazzeri, Finzioni Signadori, nous trouvons la description suivante du déroulement des batailles des mazzeri : « Une fois par an, la nuit du 31 juillet au 1ier août, les mazzeri de chaque village s’organisaient en une milizia, élisaient un capitaine et partaient combattre les mazzeri d’un village voisin; ou plutôt, ils rêvaient qu’ils faisaient ainsi. Ces batailles-fantômes, connues sous le nom de mandrache, avaient habituellement lieu sur un col de montagne situé entre les territoires des deux villages. Les mazzeri étaient munis de leurs armes habituelles : fusils, mazza, haches, lances, couteaux. Selon Multedo, certains mazzeri étaient armés de tibias humains, tandis que dans deux villages du versant ouest de la Corse, Soccia et Guagno, ils se servaient de tiges d’asphodèle »[43]. L’enjeu de ces combats était la mortalité annuelle du village : les gagnants perdront le moins d’âmes dans l’année. Roccu Multedo ajoute à propos des ces combats que leurs participants étaient masqués en animaux. Les remarques de Vannina Lari à propos de ces batilles nous semblent être très justes et résument au mieux leur porté sociale. La chercheuse corse insiste premièrement sur des effets dans la réalité d’un combat onirique, et ensuite elle nous ramène vers la conclusion sur le caractère ambivalent du phénomène mazzerique car l’exemple de ces batailles montre le mazzeru lié à la fois à la vie et à la mort : « indissociables moments formant le Destin. » Dans son article, nous trouvons de plus, une information intéressante sur la participation des villageois dans cet événement annuel : « on raconte qu’à leur réveil, les habitants des villages rivaux déterminaient quelle Cumpagnia (milizia) est gagnante en observant de quel côté va la fumée des feux allumés la veille, pour la bataille, afin de guider les mazzeri. Outre les feux de signal, les habitants des villages prévoyaient également des récipients remplis d’eau, car on raconte que les esprits- des morts comme des vivants- ont toujours soif. Cela rejoint le rituel d’I Morti, qui a lieu le deux Novembre »[44]. En somme cette tradition des combats mazzeriques rassemble plusieurs croyances corses portant sur le monde des morts dans lequel comme nous l’avons déjà dit le mazzeru joue un rôle intermédiaire : selon sa réputation, il n’appartient vraiment ni au monde des morts ni à celui des vivants car, comme nous le signale Roccu Multedo, dans la vie réelle c’est un être maladif donc à la frontière entre la vie et la mort, mais par contre, il est considéré comme immortel, ne pouvant quitter paradoxalement, le monde réel que lors de ces combats rêvés. Il semble appartenir à une société : cumpagnia, milizia, donc le mandrache est une « mission » de groupe et non solitaire.

Le molphar, le gromivnék, combat seul les puissances célestes ; son combat est aussi, comme celui du mazzeru, pour la vie dans son village sauf que cette fois-ci la mort se présente telle une menace concrète : celle de la faim. Si le gromivnék faillit à son devoir collectif, les orages détruiront le fruit des labeurs humains. En été, à l’approche des nuages qui apportent la pluie avec l’orage, il se place sur le dernier sillon d’un des champs de son village et lit les incantations pour détourner l’orage qui peut détruire toute l’agriculture. Dans sa bataille, il utilise le couteau de la grêle, le bâton et un rituel contre l’orage. Avec l’aide des forces supérieures et par la puissance des mots, il détourne l’orage des champs : il coupe le nuage avec son couteau occulte et il le fait partir en direction de la forêt ou de la rivière, ou encore sur les rochers, sur ces lieux non cultivés de la nature sauvage. Le plus difficile pour ce défenseur des récoltes, c’est lorsque la foudre éclate, il n’y a que les plus forts qui puissent la combattre. Dans les époques lointaines, ces guerriers de la foudre savaient l’utiliser contre les ennemis étrangers.[45] Dans le roman de Kotsioubynsky nous trouvons une peinture excellente de cette bataille livrée par un des personnages, le mophar Ioura, présenté ici comme un vrai guerrier redoutable pour son adversaire céleste : seul en face de « l’armée des nuages ». Il nous est difficile de ne pas citer entièrement un des plus beaux passages de ce livre mais vu sa longueur nous devrons nous contenter de la fin de ce combat qui illustrera le mieux la fonction du gromivnék du protecteur et du guerrier à la fois :

« Cependant Ioura ne voulait pas céder. Il devint encore plus blême, ses yeux s’assombrirent. Quand le nuage allait à droite, il le suivait, quand il allait à gauche lui aussi allait dans cette direction. Ioura courait à sa suite, en agitant les bras, en luttant avec le vent, en menaçant avec son bâton. Il se tortillait comme une anguille, il se mesurait avec le nuage, le retenait…Encore un peu, encore de ce côté. Il sentait de la force dans sa poitrine, envoyait du tonnerre par ses yeux, levait les bras au ciel en répétait ses imprécations. Le vent s’engouffrait dans son gilet de peau et le frappait à la poitrine ; le nuage grognait, claquait son tonnerre, cinglait les yeux de pluie, tremblait au-dessus de sa tête, prêt à tomber, et lui couvert de sueur, respirait à peine, il s’affairait sur la hauteur, hors de lui, craignant de perdre ses dernières forces. Il sentait que celles-ci commençaient à s’affaiblir, que sa poitrine était vide que le vent arrachait sa voix, que la pluie noyait ses yeux, que le nuage avait le dessus et alors dans un dernier effort, il leva vers le ciel son bâton court :

- Halte !

Le nuage s’arrêta soudain. Il souleva de façon inattendue un de ses bords, se cabra comme un cheval, craqua d’une colère intérieure, désespéré de son impuissance et se mit à supplier :

- Lâchez-moi ! Où dois-je aller ?

- Je ne te lâcherai pas !

- Lâche-le sinon nous périrons ! – criaient les âmes, courbées sous le poids des sacs remplis de glace.

- Ah ! Maintenant tu supplies !... Je t’adjure : disparaîs dans l’inconnu, dans les gouffres, là où ne parvient ni le hennissement des chevaux, ni le meuglement des vaches, ni le bêlement des mouton, ni le vol des corbeaux, là où l’on n’entend aucune voix chrétienne… C’est là que je te laisse partir…

Et chose incroyable, le nuage obéit et se dirigea, soumis, vers la gauche et défit ses sacs au-dessus de la rivière en déversant une grêle drue sur les rives. Un rideau blanc couvrit les montagnes et dans la profonde vallée quelque chose bouillonna, craqua et fit un bruit sourd. Ioura tomba par terre en haletant. »[46]

L’évocation des âmes dans cet extrait littéraire n’est pas faite par hasard. Selon les croyances goutsouliennes, les nuages qui apportent les orages destructeurs sont peuplés des âmes noires des morts néfastes et le molphar, seul, sait les combattre.[47]

Cette personnification de la nature n’a rien d’étonnant, la majorité des mythes sont construits sur la base de l’imaginaire anthropologique[48]. Mais pour notre comparaison, ces âmes représentent l’équivalent des esprits des mazzeri qui s’affrontent. Surtout que les mandraghe – c’est également l’occasion pour les mazzeri vivants de lutter contre les mazzeri morts. Roccu Multedo dit que : « cette pratique est attestée notamment è Bilzese, Cognocoli et dans le Cruzzini. »[49] D’autre part les mazzeri ne se battent pas à n’importe quel moment de l’année tout comme le molphar ne peut se mesurer avec ces âmes noires que dans une période bien déterminée dans son calendrier.

Le temps de combattre.

La notion du temps est primordiale et pour les combats mazzeriques et pour ceux du molphar avec les nuages.

Les mazzeri se battent la nuit du 31 juillet au 1ier août.[50] Selon les croyances carpatiques[51] les orages sont « affrontables » que durant la période qui suit la nuit après le St Jean- Baptiste (le 7 juillet) jusqu’au le jour du St Ilia (le 2 août). La dernière date comme par hasard est très proche de la date du combat mazzeriques.

Selon le calendrier catholique, le 1ier août, c’est la Saint Pierre (le 12 juillet chez les orthodoxes). Roccu Multedo évoque les célébrations antérieures au christianisme qui avaient lieu à cette date comme la fêtes des Macchabées : « du nom de sept frères martyrisés en 168 avant J. C. pour leur fidélité à la loi de Moïse et « la fête celtique de Lugnasad, l’un des quatre grands sabbats annuels avec le 1er mai, le 1er novembre et le 1er février »[52] Et bien sûr l’Eglise a récupéré les fêtes profanes, les fêtes païennes les transformant en siennes. C’est ainsi que le jour de sabbat devient « officiellement » le jour de tous les saints suivi de la commémoration des morts.

Ce parallèle que Roccu Multedo fait entre les dates, lui permet de comparer les combats mazzerique avec la bataille du 1er mai, en l’île de Bretagne : « Elle mettait aux prises un dragon rouge, champion de la cause bretonne, et un dragon , «de race étrangère, qui représente les Saxons ». Sa couleur était blanche. Et, comme celle des mazzeri, la bataille commençait par « un cri effrayant »[53] . Le fait que les mazzeri se battent en masques représentant des animaux et l’étymologie du mot « mandraca » qui veut peut–être signifier selon le chercheur corse : «par intermédiaire des dragons » ( bataille per man’(mano) draca) » [54], alimentent cette hypothèse comparative. Il est intéressant qu’en russe et en ukrainien aussi, le mot dragon se prononce dracon et le mot « draca » (n.f.) signifie tout simplement une bataille, ou plus précisément une bagarre[55] mais comme cette dernière n’a rien d’organisée, étant avant tout une affaire de rue, nous ne pouvons pas appeler ainsi ni les mandraghe ni les combats molphariques avec « les puissances célestes » qui représentent plutôt tout un événement, un rituel dont les conséquences sont attendues et redoutées par toute la communauté même si cela ne se passe que dans les rêves en ce qui concerne la variante corse

Roccu Multedo compare également les « mandraghe » corses aux luttes entre les chamans du Caucase sous forme animale en établissant de cette manière une relation entre chamanisme et mazzerisme [56]. L’utilisation de ce terme est critiquée par Vannina Lari. Selon ses arguments : « le mot mazzerisme tendrait à faire croire qu’il s’agit d’une religion à part entière, mais la croyance en cet intermédiaire que l’on appelle mazzeru n’est qu’une facette, une fraction d’un système de croyances qui met en place une organisation spatio-temporelle appelant d’autres acteurs, humains, animaliers ou divin. »[57] Nous n’allons pas participer à ce débat scientifique, ne faisant que signaler ici, le caractère discutable de ce néologisme corso-français).

Toutes ces comparaisons nous montrent l’importance de la thématique animalière pour les « mandraghe » et pour les mazzeri en général indiquant de même leur lien incontestable avec le totémisme. L’importance de dates relève aussi du caractère sacré des combats mazzeriques et des combats molphariques. Quant au déroulement de ces derniers il serait plus juste de parler d’une période que d’une date qui est aussi en lien avec un animal en l’occurrence avec un oiseau qui est aussi un animal psychopompe.

Voilà comment la chercheuse ukrainienne Gromovitsa Berdnik nous le décrit : « après la nuit de St Jean–Baptiste, commence la période qu’on appelle en Ukraine « Les nuits des moineaux »[58] pendent lesquelles il advient souvent que les orages violents éclatent au-dessus des montagnes, accompagnés par des foudres brûlantes. Ce sont les jours où les esprits des orages sortent pour leur promenade annuelle. Ce sont eux qui envoient sur terre la foudre comme des décharges vivifiantes qui apportent sur Terre une énergie bien particulière. Et c’est à ce moment qu’entre le ciel assombri par les nuages et les sommets des montagnes s’élèvent les arbres de feu unifiant ainsi la terre et le ciel. Cela va durer jusqu’ au jour de St Illia (le 20 juillet ou le 2 août), jusqu’à cette ancienne fête des Orages et des Tonnerres. Après cette date les orages « se calment et battent en retraite ». En cette période les molphars accomplissent les rituel spéciaux pour protéger les champs de la grêle et les maisons contre les incendies qui peuvent être déclenchés par un coup de foudre »[59]

Le début de cette période s’ouvre par la fête de Jean Baptiste[60] qui est « la fête la plus importante pour les chamans », affirme Mékhailo Néchaiy. Il explique que : « c’est la naissance du monde pour l’année prochaine. Pendant cette fête, nous exerçons des rites bien spéciaux pour tous ceux qui sont avec la nature pour qu’ils se confirment, pour qu’ils se solidifient en elle et pour leur procurer de la force. Alors notre mot devient puissant »[61]

En ce qui concerne St Illia, dans les nombreux pays orthodoxes surtout en Bulgarie et en Ukraine, il est considéré comme le seigneur du feu céleste ce qui le lie incontestablement avec ces guerriers de la foudre que sont les gromivnék. St Illia a remplacé le dieu païen de la mythologie slave, le dieu des orages et des tonnerres Peroun, l’équivalent de Tor et de Zeus. Selon la légende, quand les anges corrompus par le Diable se sont révoltés contre le Dieu, le Seigneur a commandé à St Illia de les chasser du ciel et depuis St Illia court dans le ciel, après ces traîtres en leurs tirant dessus avec l’orage et la foudre[62]. Cette légende est très proche de la variante goutsoulienne car l’expression «les âmes noires » peut être interprétée tout simplement comme une métaphore désignant ces anges corrompus par le Diable, ou encore, la légende conservée chez les goutsouls est le prototype préchrétien de la légende ukrainienne sur St. Illia. Mais revenons aux molphars, toujours du même auteur ukrainien, Gromovitsa Berdnik, nous apprenons que le 2 août, pour eux, est un jour sacré. Et non pas simplement parce c’est la fin de leur « guerre » avec le ciel orageux jusqu’à l’année prochaine, mais aussi parce que les molphars d’antan pouvaient être considérés comme les flamines carpatiques du Péroun. De plus, le Seigneur du feu céleste (Péroun ou St Illia) est protecteur des guerriers et des forgerons. Parmi les molphars il y avait ceux qui fabriquaient les armes et ceux qui se spécialisaient uniquement sur la bijouterie et les amulettes, travaillant avec du métal précieux. Les amulettes en métal ou les molpha, ne pouvaient être faites que pendant ces « nuits de moineaux » pour être efficaces. Les hommes goutsouls portaient en qualité de molpha l’anneau couronné d’une tête représentant l’esprit du mal, on croyait que c’était la meilleure protection contre les forces noires. On pratiquait aussi les molpha pour les chevaux, animaux vénérés par les goutsouls. En leur mettant les attelles sorties de l’atelier d’un molphar - forgeron on les protégeait contre le mauvais œil des sorcières. En ce qui concerne la fabrication des armes, leur persistance et leur efficacité s’assuraient aussi en cette période par les molphars qui en était les spécialistes. Mais leurs propres armes pour combattre « les âmes noires » sont un sujet à part, tout comme les armes utilisées par les mazzeri, c’est un sujet qui révèle de l’ambivalence de deux phénomènes.

Chapitre3.

De nuire à guérir

Les armes sacrées.

Une des armes les plus sacrées les plus « magiques » des mazzeri est bien sûr l’asphodèle. Ces bâtons sont utilisés lors de leur combat annuel. Dans l’article de Vannina Lari, nous lisons: «l’asphodèle posée en croix sur les récoltes assure leur protection contre les esprits farceurs ou malfaisants ». Ce qui peut aussi représenter le point de rapprochement entre le mazzeru « régulateur de la mortalité » et le protecteur de la vie et le molphar régulateur du temps, protecteur des récoltes et donc de la vie. Roccu Multedo nous dit à son tour que « l’asphodèle jaune est encore un bâton, celui de Jacob, surnommé Israël, c’est-à-dire «le fort contre Dieu». A-t-il employé l’asphodèle dans sa rébellion contre l’Ange? c’est ce que rappelle peut-être l’arme des mazzeri , dont Madame Lucia Desideri fait remarquer que les feuilles sont lancéolées ; cela en renforce le symbole, par rapport aux lanceri : si la tige est frêle, la feuille a, ainsi, la force potentielle de la lance ». Par ailleurs, cet auteur corse, note que : « les tubercules d’asphodèle contiennent un alcool très pur : dans le Sud, les enfants les font éclater, la nuit de la Saint Jean (justement l’ouverture de période des combats molphariques), qui dans le Frioul, voit comme à chacun des Quatre Temps, une bataille des Benandanti ; ceux-ci, pour chasser les sorciers, sont armés de tiges de fenouil ou de viorne-tin. »[63] Cette remarque est très importante pour nous car elle prouve que la symbolique des combats sacrés ne se limite pas aux animaux, le monde végétal y participe aussi.

C’est ainsi que le molphar emploie une branche d’arbre comme arme contre les sorcières, il s’agit de gromovitsa. C’est un objet qui incarne le pouvoir du molphar : une branche tombée du sapin lors d’un orage où la foudre a fait un trou, et c’est justement cette ouverture faite d’une manière naturelle qui est dotée de vertus magiques[64]. Si le molphar souffle à travers de ce trou sur la sorcière ses pouvoirs s’envolent.[65] De la même manière on peut aussi guérir les maladies.

Bien évidement l’asphodèle et la gromovitsa sont plutôt les armes-symboles mêmes de la magie. Cependant ni les mazzeri ni les molphars n’utilisent les « vraies » armes d’attaque ou de défense qui ont aussi leurs propres portées symboliques. Ce sont les bâtons ou les massues, les couteaux et les lances.

Là-dessus Roccu Multedo nous informe que « Pour Florange, les mazzeri sont armés d’une hache invisible dont un anonyme du début du siècle fait une massue. Les mazzere se servent, en général d’un bâton fait d’un cep de vigne, u putizzu. Ce bâton rappelle celui des Bacchantes, le thyrse orné d’une pomme de pin, avec lequel elles tuaient leurs victimes, comme elles déguisée en oiseau ou en chien. »[66]

Dans son affrontement contre le feu du ciel le molphar utilise un bâton: une branche d’arbre avec la quelle il a séparé auparavant le serpent et la grenouille. Deux animaux que les molphar, avec la tortue, vénère énormément. Ici le symbole végétal et le symbole animal ne font qu’un. La grenouille représentant le monde souterrain des esprits et des ancêtres morts, et aussi la pluie que ces ancêtres offrent à la terre. Cet animal est aussi, d’un côté, le symbole de la sagesse cachée et, de l’autre, le totem des sorcières, ce qui démontre encore une fois l’ambivalence de la symbolique païenne. Alors le bâton qui a servi pour la délivrer du serpent est utilisé aussi pour arrêter les querelles entre les gens. C’est une arme d’attaque et de défense à la fois.

Quant à l’utilisation par les molphars de la hache, comme dans toutes les traditions chamaniques, c’est une arme sacrificielle. Mais les molphars étaient plutôt ceux qui fabriquaient les longues haches spéciales pour les combattants populaires ukrainiens, pour les bandits d’honneur. Ce qui comptait le plus pour l’efficacité d’une telle arme destinée à la défense d’une cause nationale c’était le dessin sur sa manche « d’une roue d’orage ». A l’intérieur de cette roue étaient représentées les six (parfois huit ou au maximum douze) aiguilles ou feuilles lancéolées (ce qui n’est pas sans évoquer l’asphodèle mazzerique). Cette «marque» de fabrication molpharique n’était pas exclusivement réservée aux haches de combat. En Goutsoulchina, on peut les trouver sur les toits des maisons et sur les ceintures des hommes étant le symbole masculin. Une telle roue protégeait l’habitat contre la foudre qui, en frappant, aurait pu le brûler ainsi que le propriétaire de la ceinture ou de la hache : elle protégeait de la malemort. En France, en Allemagne, en Russie le même symbole figurait sur les murs des maisons pour les protéger contre la foudre.[67]

Les mazzere de Chera, opèrent avec un couteau[68], peut-on en conclure que c’est une arme exclusivement féminine ? Certainement pas. Mais vu sa petite taille et son aspect tranchant, il a du être considéré comme facile pour l’usage féminin.

Le couteau de grêle de molphar est son arme essentielle dans son combat contre les âmes noires qui peuplent les nuages «armés» de la grêle pour détruire les récoltes. Sans cette arme, le molphar n’est pas gromivnék. C’est pour cette raison que le rituel initiatique, dans cet art consiste, avant tout dans la fabrication de ce couteau. .

Le novice doit sortir tout nu dehors, avant l’aube, à la veille du Noël pour fabriquer ce couteau bien spécial à partir du côté tranchant de la faucille. Il ne s’agit pas non plus de prendre n’importe quelle faucille, mais celle qui a été cassée le jour des premiers travaux agricoles printaniers, ou celle avec laquelle on a coupé un serpent, sans le faire exprès. Lorsque la recrue prépare son couteau, il faut que le silence total règne dehors, surtout il ne faut pas qu’elle entende une voix humaine. Une fois le couteau prêt, le futur molphar s’agenouille et prononce 300 fois une prière spéciale, chaque incantation devant se faire sans qu’il reprenne son souffle, d’un seul trait.

Ensuite, celui qui a décidé de devenir « gromivnék » ne doit pas parler de toute la journée, (comme s’il devait commencer de sentir tout le poids des mots d’un molphar, car ses mots ne sont jamais vides, ils sont chargés de sens, ils sont ses armes qu’il utilise dans ses rituels magiques ou pour guérir les gens), et le soir quand toute sa famille est réunie autour de la table pour le repas de Noël, le futur « gromivnék » commence par goûter, petit à petit, des plats festifs différents. Puis il prend dans sa main son couteau occulte et fait avec lui un tour de la maison suivant le mouvement du soleil. A la fin, il se place sur le seuil de la maison (là où autrefois, on enterrait des ancêtres morts), le visage tourné dans la direction du lever de soleil et invite le roi-grêle à partager son repas de Noël[69].

En hiver, les goutsouls ne craignent ni l’orage, ni la grêle, c’est, pense-t-on, la période de paix des âmes noires. Donc le gromivnék doit en profiter pour assurer sa défense et même sa victoire dans son futur combat en concluant une sorte de pacte avec son adversaire endormi, et en se procurant son arme tranchante.

La lance est l’arme des lanceri du Sartinesu. Et en dehors de son aspect guerrier que nous avons déjà évoqué, c’est l’arme obligée de tout chaman.[70] Chez certains parmi eux elle fait carrément partie de leurs costumes comme par exemple chez les Bouriates, « un casque, portant à sa partie inférieure un morceau de fer en forme de lance ; deux bâtons en avant desquels sont fixés, entre autre, une lance une épée, une hache… un fouet, avec (en miniature) : une épée, une massue à pointe (Eliade, p.132) »[71]. Et cela même si le molphar préfère le couteau à la lance. La symbolique de cette arme est universelle, elle est, comme nous le dit Roccu Multedo « l’Arbre du monde », c’est-à-dire l’axe du monde, le chemin du ciel ».[72]

Et avant de refermer cette liste que nous avons essayer d’établir ici pour ce rapprochement entre les armes qu’utilisent les mazzeri et celles des molphars, il est important d’insister sur un point de différence majeur qui existe entre elles : c’est le fait que les molphars, pour le combats ou pas, se servent de leurs couteaux ou de leurs bâtons en réalité dans le monde de vivants et non pas lors de leurs transes tandis que les mazzeri en tant que tels n’en font usage que dans leurs rêves.

L’autre chose que nous devons remarquer à propos des molphars, c’est leur lien spirituel avec la foudre et l’orage, lien qui se manifeste à travers tous les domaines dans lesquels ils exercent. Quant aux mazzeri à part que selon Max Caisson: «La vocation mazzerique est obtenue par suite de foudroiement, qui ferait de la personne frappée par la foudre, un Signatu da Cristu »[73], ils sont avant tout un écho de la tradition des chasseurs prénéolithiques qui sont devenus dans l’imaginaire populaire corse les régulateurs de la mortalité. Pourtant, il existe des hypothèses selon lesquelles autrefois le champ d’action du mazzeru était plus vaste que nous ne le croyons être aujourd’hui. Justement vu que les orages en corse ne sont pas moins violent qu’aux Carpates et que l’on craint la foudre sur cette île tout autant qu’ailleurs, Dorothy Carrington admet la possibilité que les mazzeri aient été aussi les régulateurs du temps partageant cette fonction avec les signadori, les guérisseuses populaires[74] . Et guérir est aussi une des fonctions du molphar.



L’art médicinal

De nuire à guérir, c’est comme de la haine à l’amour, il n’y qu’un seul pas à franchir. Et les mazzeri et les molphars sont plutôt les phénomènes ambivalents. Aujourd’hui dans la fiction littéraire corse, le personnage du mazzeru est romancé : on parle souvent du mazzeru blanc ou noir comme s’il y avait vraiment des camps des mazzeri clairement distingués entre eux. C’est ainsi que dans le roman d’André-Jean Boneli, La mazzera, le personnage féminin principal incarne le bien et empêche le mal de se produire, elle est une mazzera salvadora. Roccu Multedo à son tour nous explique qui sont ces mazzeri salvadori de la manière suivante : « D’aucuns (en parlant des mazzeri) sont des guérisseurs d’âmes, qui, connaissent les chemins du ciel et de l’enfer, essayent à la manière des sorciers africains, de ramener l’âme égarée dans le corps malade. Les mazzeri salvadori empêchent cette âme de franchir le gué ou le pont ou encore a paranu d’entre in ghjesa (l’empêche d’entrer à l’église) ou de toucher la porte du cimetière : ce sont là des frontières entre les deux mondes »[75]. Visiblement nous nous retrouvons en contradiction avec la définition de Ghjasippina Thury-Bouvet que nous avons présentée au sujet du double, selon laquelle le devoir de mazzeru c’est d’aider l’âme à franchir les Limites. Apparemment, il y en a qui font exactement le contraire. Mais peut-on réellement parler de mazzeri blancs ou noirs tout en sachant que ni l’un ni l’autre n’agit de son plein gré, et que c’est le destin qui guide leurs mains ? Même la petite mazzera d’André-Jean Boneli ne choisit ni son sort et ni son “camp”, c’est pendant son rêve initiatique que tout s’est déterminé avec l’aide de la providence. La glose de Roccu Multedo nous propose la solution à ce problème : « Nous appelons « blancs » les mazzeri sauveurs. Il est d’autres mazzeri qui finissent par prendre goût à la « chasse et par sortir, la nuit, comme des somnambules, afin de rester à l’affût de ce qui peut se passer dans leur cunfina. Selon l’excellente expression du culpadore de Figari, ils sortent in vita (en chair et en os). Nous les appelons mazzeri noirs, alors, que les blancs-noirs pourront, du fait qu’ils sont ambivalents, être pris dans l’une ou l’autre catégorie. »[76]

Les molphars quant à eux sont des mages dans le sens direct de ce mot. Ce qui veut dire qu’un molphar sait comment il peut influer sur la nature et peut aussi utiliser ces puissances naturelles pour le bien ou pour le mal. Tout molphar connaît la magie blanche et la magie noire. « La différence entre le molphar blanc et noir est dans l’objectif de ses rituels »[77] Mais dans ce cas la distinction entre un molphar blanc et noir n’est pas si nette, non plus. Dans le livre de Gromovitsa Berdnik, Mékhailo Néchaiy, la source principale des ses recherches dit que : « La magie noire est offerte par les forces maléfiques… Et les mages qui ont ce pouvoir, ne peuvent agir que pour faire du mal à tous les vivants : aux humains aux animaux. Ils collaborent avec l’esprit du mal à l’affront des lois divine contre le Dieu lui-même »[78]. Mais dans l’interview qu’il à donnée le 21 mars 2007 dans le journal local «Vie !» cet ultime représentant vivant du molpharisme affirme que : « Dans le monde coexistent les forces (divines) blanches avec les forces (diaboliques) noires comme le moins et le plus. Entre elles c’est la lutte permanente. Les forces claires calment l’agressivité des forces sombres. Notre vie sur la Terre est le résultat de cette lutte : sans moins le plus n’agit pas, et vive-versa. Voilà pourquoi, il ne faut pas avoir peur du Diable, mais il ne faut pas le tenter non plus ». Ce qui est intéressant aussi c’est qu’il perçoit son don comme un poids lourd qu’il doit porter toute sa vie, un mazzeru peut dire la même chose. Même si la responsabilité de ses actes est moindre que celui du molphar si on peut vraiment parler de la responsabilité en ce qui concerne des mazzeri. Tout de même un molphar et un mazzeru basculent tout le temps entre ce qu’on appelle le noir et le blanc. Et même si Mékhailo Néchaiy semble être catégorique sur le fait que celui qui choisit de servir le Mal ne peut faire du bien et inversement, lui-même avoue dans la même interview avoir fait du mal, tout en étant au service du Bien, en abusant de ses pouvoirs lors du festival national des chants « Cervona Routa » quand il a entretenu le beau temps non pour assurer la survie de la population ou pour protéger les récoltes mais pour des fins oisives, ce qui est selon lui, un péché grave. Le molphar Ioura de Kotsioubynsky est un personnage ambivalent par excellence : il affronte l’orage et la foudre en tant que protecteur de sa communauté et en même temps guidé par l’amour interdit il applique la magie noire pour nuire au mari de sa maîtresse et devient la cause indirecte de sa mort sans le moindre scrupule. D’ailleurs, selon Mékhailo Néchaiy le prototype de ce personnage de la fiction littéraire serait un vrai molphar qui aurait vécu aux Carpates au XIXième siècle, ce qui augmente la fiabilité de cet exemple. Mais ce qui nous importe, avant tout, c’est le fait que celui qui sait nuire peut guérir, peut sauver et détruire. Et guérir est aussi du domaine de la magie blanche.

Pour définitivement conclure la première partie de notre travail, pointons ses moments principaux : nous avons commencé par définir les phénomènes mazzeriques et molphariques en nous orientant sur la figure intermédiaire du chaman. Les rêves mazzeriques et les transes molphariques tout en étant, entre autre, un moyen d’extase, ne sont pas tout à fait ni de la même nature ni de la même portée. La notion de guide est présente dans les deux mais repartie différemment : le mazzeru est le guide des âmes dans le monde de la mort, le molphar a son propre guide de ce monde parallèle à celui de vivants. Quant à leurs actions, les mazzeri et les molphars agissent avant tout dans l’intérêt de leur communauté, ils y sont craints mais respectés. Les mazzeri dans ce cas sont les régulateurs de mortalité (surtout lors de leur combat annuel) et les molphars les régulateurs du temps : ils s’affrontent aux « âmes noires » des nuages apportant avec l’orage, la pluie dévastatrice et la grêle. Le mazzeru représente avant tout dans ces rêves, le monde des premiers chasseurs et tout ce qui s’y rapporte, le totémisme inclus, tandis que le molphar est, apparemment, celui qui dans des époques lointaines était le flamine de la divinité de la foudre et de l’orage.

En somme, les molphars, semblent « cumuler » plusieurs fonctions réunies (le régulateur du temps, le guérisseur, le mage), alors que les mazzeri représentent un univers très particulier dans lequel le destin et la mort sont des éléments capitaux. Pourtant rien n’empêche de considérer le molphar carpatique cousin éloigné du mazzeru corse surtout par rapport à la relation qu’ils entretiennent avec leur double. Il nous sera maintenant possible d’évoquer enfin la vivacité de l’ancienne tradition, en Corse et en Ukraine


[1] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994

[2] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[3] Mykhaïlo Kotsioubynsky, Les chevaux de feu ou les ombres des ancêtres oubliés, « L’AGE D’HOMME », Suisse, 2001

[4] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994

[5] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994, p. 73

[6] Le magasine « La roue de la Vie », à n°5, le février, 2006, « La sagesse d’un vieux molphar »

[7] Jerome Pietri et Jean-Victor Angelini Le chamanisme en Corse, Paris, 1994

[8] [8] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994, p. 74

[9] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994, p.119

[10] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[11] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994,

[12] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[13] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[14] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[15]Jerome Pietri et Jean-Victor Angelini Le chamanisme en Corse, Paris, 1994

[16] Gilbert Durant, Les structures anthropologiques de l’imaginaire, « Dunod », Paris, 1992

[17]Jerome Pietri et Jean-Victor Angelini Le chamanisme en Corse, Paris, 1994

[18] Ghjasippina Thury-Bouvet, Kyrn Magazine-5 avril 1991-45

[19] Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[20] Roccu Multedo, Le mazzerisme est- il un chamanisme corse ?, Paris, 1994, p. 54.

[21]Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[22] Dorothy Carrington, Mazzeri, Finzioni Signadori, Gênes, mai 2000

[23] Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[24] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994

[25] Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[26]Dorothy Carrington, Mazzeri, Finzioni Signadori, Gênes, mai 2000, p.71

[27] Dorothy Carrington, Mazzeri, Finzioni Signadori, Gêne , mai 2000, p.71

[28] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[29] Gromiovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[30] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006, p. 230

[31] Le magasine « Vie », le 21 mars 2007 ; « L’interview avec le molphar Mékhailo Néchaiy »

[32] Les mythes d’Ukraine, Kiev, 2003,

[33] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[34] Gromovitsa Berdnik

[35] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p. 77

[36] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[37] Gilbert Durant Les structures anthropologiques de l’imaginaire, « Dunod », Paris, 1992

[38] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p.

[39] Roccu Multedo, Le mazzerisme est- il un chamanisme corse ?, Paris, 1994, p. 57

[40] Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[41] Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[42] Gromitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[43]Dorothy Carrington, Mazzeri, Finzioni Signadori, Gêne , mai 2000, p.71

[44] Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[45] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[46]Mykhaïlo Kotsioubynsky, Les chevaux de feu ou les ombres des ancêtres oubliés, « L’AGE D’HOMME », Suisse, 2001p. 76-77

[47] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[48] Gilbert Durant Les structures anthropologiques de l’imaginaire, « Dunod », Paris, 1992

[49] Roccu Multedo, Le mazzerisme est- il un chamanisme corse ?, Paris, 1994, p. 55

[50] Dorothy Carrington, Mazzeri, Finzioni Signadori, Gêne , mai 2000, p.74

[51] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[52] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p. 97

[53] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p. 98

[54]Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p. 97

[55] P. Pauliat , Dictionnaire français – russe russe – français, « Larousse », Paris, 2006

[56]Roccu Multedo, Le mazzerisme est- il un chamanisme corse ?, Paris, 1994, p. 55

[57] Vannina Lari, Mazzeru, article publié dans « L’Encyclopaediae Corsicae » volumes 2 et 3

[58] La variante originale « Gorobéni nocci » le premier mot est l’adjectif dérivé du « mot » gorobets signifiant le moineau, il est difficile d’expliquer la provenance d’une telle appellation, mais nous y voyons un lien phonétique car gorobets est proche du mot grom (l’orage).

[59] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006, 315

[60] Le titre orthodoxe original « Ivano Koupalo », cette fête chez les slaves est un mélange exemplaire entre la tradition païenne et chrétienne.

[62] Oleksa Voropay, Les coutumes du peuple ukrainien, Kiev, 2006, p. 350

[63] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p. 94

[64] Le magasine « La roue de la Vie », à n°5, le février, 2006, « La sagesse d’un vieux molphar »

[65] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[66] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p. 94

[67] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[68]Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994

[69]Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006

[70]Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994

[71]Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994

[72]Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p. 95

[73]Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p.23

[74]Dorothy Carrington, Mazzeri, Finzioni Signadori, Gênes, mai 2000, p. 157

[75] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 p.30

[76] Roccu Multedo, Le mazzerisme un chamanisme corse, Paris, 1994 , p. 31

[77] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006, p. 41

[78] Gromovitsa Berdnik, Les signes de la magie carpatique, Kharkov, 2006, p. 41